Heures de réveil : 3h17, 4h01 (chats)

J’ai le précieux sésame pour aller me faire vacciner. Sauf que le seul centre capable de me recevoir ne prend pas les personnes de moins de 60 ans, de manière un peu arbitraire car je suis bel et bien dans la liste « à très haut risque ».
Dans tous les cas, je n’ai pas le droit à l’Astrazeneca, et après le retrait de ce dernier beh y’a plus de place nulle part. Ou à Paris. Ou pas, parce que les créneaux partent en 2 mn…

Par ailleurs, un créateur de contenu que j’aimais bien (Yoann explique la vie) a été callout hier et je vais mettre un peu de temps à m’en remettre je crois. J’ai un peu creusé, j’ai vu des tweets atroces et…pfffffffffff…

Pourquoi ça arrive tout le temps ? C’est pas le premier à profiter de sa notoriété pour essayer de pécho. Sauf que à la limite, tu pécho des adultes, pas des gamines de 13 ans…non ? L’histoire se répète tellement, je sais plus si c’est Links The Sun ou un énième Youtuber ou encore un autre ou alors celui-ci.

Vous êtes décevants, tous. Sans exception.

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Ce qui me TUE c’est que c’est toujours des mecs. C’est symptomatique. Des youtubeuses célèbres y’en a beaucoup, je pense que c’est un des domaines avec le streaming où les femmes « percent » le plus malgré les hordes de gros harceleurs.

Des youtubeuses qui agressent…je n’en connais pas (edit octobre 2022 : j’ai 2 cas à présent, woot woot !). Je ne dis pas que ça n’existe pas, mais merde, 90% de la population carcérale est composée d’hommes.

On a des affaires de profs qui « séduisent » leurs élèves, notre Première Dame connaît bien la question d’ailleurs. Mais je suis sûre, je sais d’avance, que cela ne représente qu’une infime fraction de l’ensemble des cas. Des histoires de profs hommes qui couchent avec leurs élèves, y’en a plein.

J’ai besoin de transformer ma déception en quelque chose et j’en ai marre qu’on parle des agresseurs. Alors je vais parler des agresseuses.

Je m’intéresse à la crimino depuis un moment, en totale dilettante (je lis des articles et des études et des livres mais je ne suis pas psy), la question m’a toujours obsédée :

A droits égaux, est-ce que les femmes tueraient autant que les hommes ?

Une théorie propose que la disparité dans la criminalité sera « lissée » et qu’au bout d’un moment, on sera à égalité.
Ça semble logique, mais…on oublie un truc super important : les femmes ont plus tendance à se remettre en question et semblent plus regretter leurs actes.

Je vais tenter de répondre au moins en partie à la question, je te préviens, je pose des mots en même temps que je les pose dans ma tête, ce sera peut-être un peu fouillis, je vais faire de mon mieux.

Femme frappant son mari, par Albrecht Dürer au xviie siècle.

🦝🦝🦝

C’est une question cruciale pour le féminisme, je vais prendre le temps de creuser un peu, il y a énormément à dire sur le sujet.

💥 Pourquoi les femmes sont globalement moins violentes ?

On va passer rapidement sur la thèse évopsy : c’est parce qu’on est pas câblés pareil et qu’on a pas évolué de la même manière, aucun lien avec le patriarcat qui n’existe pas. On est douces et sages par essence, les hommes violent pour « répondre à un besoin ». Vi vi.

Donc je refuse cette thèse complètement idiote. Désolée, je vais pas me lancer dans des discussions sans fin sur nature/culture. On vit pas hors sol, on est genré-es in utero, on est éduquée différemment, c’est complètement con que de nier l’aspect social. Idiot, mais pas déconnant venant des evopsy…
C’est pas « soit l’un, soit l’autre ». C’est « un peu des deux ». On a certes un aspect biologique, ne serait-ce que via l’apparence de nos organes génitaux et le système hormonal, mais on est des êtres sociaux, l’éducation et la vie ensemble jouent tout autant, si ce n’est plus. A mon avis, c’est l’un ET l’autre. Et l’aspect social me semble jouer un bien plus grand rôle que l’aspect biologique. Par ailleurs, je rappelle que tout le monde n’est pas « XX » ou « XY » et que les anomalies chromosomiques sont plus fréquentes qu’on ne le pense. Le genre est un tas de plein de choses plus complexes que de la biologie pure.

 

 

Quand tu recherches « evopsy » dans Google Images, tu obtient notamment ce magnifique coffret pour comprendre enfin les femmes.

Classe x classe, je sais pas quoi ajouter. Mais 29,00€ franchement c’est prix d’ami.

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Tandis qu’on élève nos fils en valorisant les comportements violents (Le fameux « boys will be boys »), on apprend aux filles que la violence est inadmissible. Une femme qui fait preuve d’agressivité sera perçue comme très très dangereuse et surtout anormale.

Je repense à l’histoire de Sabrina, ma copine d’école assassinée au collège par une camarade de classe. J’ai un souvenir très net de l’image qu’on avait de la personne qui l’a tuée. Elle était un peu plus âgée, et assez violente. On savait qu’elle avait agressé une de ses profs et qu’on l’avait changé de lycée pour ça.
Cette fille terrorisait tout le monde, parfois à raison. Mais on avait peur, et ça nous semblait complètement anormal qu’une fille fasse preuve de tant de hargne.

Pendant ce temps-là, j’avais mes propres agresseurs, ceux qui venaient m’attendre à la sortie des cours pour me menacer, que des mecs. Il y avait régulièrement des bagarres, parfois très violentes. Mais on avait pas aussi peur d’eux qu’on avait peur d’elle. Elle était imprévisible, incompréhensible. Eux étaient des mecs. On savait à quoi s’en tenir.

L’un de ceux qui est venu m’attendre était un grand frère d’un type de ma classe qui me devait des sous, argent que je réclamais. Il était « gentiment » venu me dire de faire une croix sur mon argent.
Si j’avais été un mec, j’aurais été tabassée, clairement. Vu l’attitude et la réputation du grand frère, j’ai vraiment pas fait la fière.

Tu sais ce qui s’est passé ? On a été boire un verre, faire un billard et avant de se séparer il m’a fait des avances. J’ai refusé. J’ai pris une patate (mais je suis quand même rentrée à la maison). Mais il m’a pas détruit la gueule, j’étais un enjeu pour lui visiblement.

Mon statut de meuf m’a clairement bien aidée quand je me livrais à du petit trafic de heu fournitures scolaires, voilà. Je vendais des Bic 4 couleurs sous le manteau, on va dire ça. Durant l’ensemble de ma vie ici-bas, je n’ai été contrôlée qu’une fois à la douane (je venais des Pays Bas, bon, je les comprends). Je ne sais pas s’il s’agit d’un des rares privilèges féminins mais j’en ai l’impression. Cela dit les flics nous considèrent comme des enfants, je sais pas si c’est super non plus.

En tout cas, on est relativement tranquilles là dessus. En échange on se fait harceler dans la rue, tu me diras…

Mate moi ce beau morceau !

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Les femmes sont perçues comme moins violentes. C’est le cas : elles sont moins violentes. On les éduque à ne pas être violentes et elles subissent la domination patriarcale qui s’attelle à écraser toute velléité de rébellion.

Maintenant, est-ce que ça relèverait pas aussi un peu de la prophétie auto-réalisatrice ? On est conditionnées à être non violentes, c’est même valorisé socialement. Les hommes sont conditionnés à être violents et c’est aussi valorisé socialement.

Lors de mes séances de préparation à l’accouchement j’ai rencontré une future maman dont la date d’accouchement était plus ou moins la même que la mienne. Elle attendait une fille, moi un garçon (en tout cas c’est le sexe qui leur a été assigné).
On commence le cours. J’ai eu une grossesse full « fausses contractions » et mon fœtus bougeait beaucoup. La sage femme posait la main sur mon ventre, il filait des coups de pieds. Ma compagne de galère commence les exercices, puis sa fille se réveille et lui file à elle aussi des coups de pieds, elle doit faire une pause.

Lorsque mon fœtus bougeait, on me disait « Ohlàlà quel sportif il a la pêche ! »
Lorsque celui de ma comparse bougeait, on lui disait « Elle est nerveuse hein, qu’est-ce qui lui arrive ? Vous faites de la relaxation ? »

ON DIFFERENCIE LES ENFANTS IN UTERO et on leur prête des comportements genrés comme de la « nervosité » ou « un tempérament de footballeur ». Les gosses ont même pas fini de cuire qu’on les traite déjà différemment.
Je te passe les mêmes exemples chez la nounou, puis à la crèche, puis à l’école. Mon gosse a 5 ans, il est parfaitement au courant de la ségrégation et la semaine dernière il disait au sujet d’un truc random « c’est un truc de filles » 🤦‍♀️ (edit octobre 2022 : ce n’est plus le cas, il a compris ! 🥳)

Il est pourtant élevé par une mère féministe jusqu’au bout des ongles et un père qui raccroche plutôt bien les wagons aussi. L’école et ses camarades lui apprennent le reste…

Un jour, en sortie de classe, il fait l’imbécile avec un de ses copains et une copine. Ben seule la fillette s’est fait engueuler direct. J’ai rappelé mon enfant et je l’ai aussi disputé, la mère de la fillette me dit « Oh c’est des garçons ». J’ai un peu élevé la voix. Non, c’est pas « que des garçons » et si ils ont un mauvais comportement, ils ne doivent pas être pardonnés aussi facilement. Mais là j’ai compris que ça serait toujours comme ça, qu’on pardonnerait ses comportements violents.

Tu vois, ici, le mec qui conditionne des machins a un habit bleu, ce seront donc des garçons !

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On encourage et valorise les comportements de dominants. Logique qu’ils deviennent violents. (Tous les mecs ne performent pas la violence, bien sûr, est-ce vraiment la peine de le rappeler ?)
On dit aux dominées qu’elles peuvent et doivent avoir peur des hommes. On nous éduque dans la soumission, chaque comportement déviant considéré comme « non-féminin » provoque la stupéfaction. De toutes façons tu bouges un cil t’es déjà en tort.

Un homme violent est la règle, un homme non-violent est l’exception.
Une femme non-violente est la règle, une femme violente est l’exception. Elle est l’anomalie, la déviance, la perversion. Elle sort de son rôle de mère/épouse.

Les féministes sont souvent perçues comme violentes, d’ailleurs. Elles tuent pourtant moins que le patriarcat, mais lorsqu’on élève la voix, on devient hystériques et dangereuses. La violence féminine est perçue très différemment avec notamment la crainte physique en moins.

Je n’ai pas eu la foi de poursuivre mon projet de compter le nombre de docu-crime sur des femmes vs des hommes mais j’ai pu constater que relativement au meurtre sur conjoint, par exemple, les tueuses sont sur-représentés. Un homme qui tue sera vu avec plus d’indulgence : sa femme le trompait, elle était méchante, etc. Une femme qui tue est UN MONSTRE. Le champ sémantique des deux partie n’est pas du tout le même. « Un bon père de famille qui aime ses enfants et qui aurait tout fait pour sa femme, on ne comprend pas », versus « Une dangereuse manipulatrice toxique violente succube venue de l’enfer ».

Il y a des séries uniquement sur les femmes : « Deadly Women » (Netflix) en est un exemple. Le public de ces séries est très majoritairement féminin, au fait. Je ne sais pas encore exactement ce que ça dit par rapport à la violence féminine mais c’est intéressant à souligner. Dans cette série pas franchement bien réalisée et franchement pas réaliste, la voix off de « Desperate Housewives » nous raconte sur un ton mutin comment unetelle a tué. Je pense qu’on juge à ce moment-là, l’autre femme, celle qui transgresse. On prend une posture moralisatrice en se disant « Non, moi je vaux mieux que ça ».
Encore une fois, c’est un sujet que je dois creuser encore, le coup de l’analyse du champ sémantique me plaît bien.

Tu sais faire plus cliché ? Si oui, wow.

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Comment s’étonner, alors, que la violence des femmes s’exprime essentiellement sur les membres de sa famille ou ses proches ? Leur champ d’action est limité à leur foyer. Elles ne peuvent exprimer leurs pulsions violentes que sur les leurs.
On le voit avec les empoisonneuses, qui tuent ceux qui dérangent, les veuves noires ou les mères infanticides. Les infanticides sont d’ailleurs sur-représentés chez les femmes. Et ça relève d’une certaine logique (je suis persuadée que si la contraception et l’IVG étaient plus simple, les femmes n’auraient pas le sentiment d’être piégées par leurs enfants).

A part Aileen Wuornos qui est un cas très particulier, la plupart des tueuses en série sont des infirmières de la mort, des empoisonneuses et des veuves noires. Elles se baladent pas en bagnole pour ramasser des personnes vulnérables dans la rue. Elles tuent « à domicile » ou au travail. Je trouve ça extrêmement significatif.

Oui mais est-ce qu’à droits égaux on deviendra aussi criminelles que les hommes ?

Imaginons un pays entièrement féministe.
Une éducation non genrée.
Si quiconque se montre violent est pris en charge et aidé (la violence vient quand même bien souvent d’une souffrance intérieure), si on autorise les hommes à pleurer et les femmes à se défouler, si on aide à la médiation des litiges entre partenaires, si on parvient à instaurer une justice réparatrice plutôt que d’enfermer les gens…

Bah j’en sais rien.
Déjà, il faut distinguer le fait d’avoir des droits et celui de pouvoir en bénéficier. On a à priori les mêmes droits entre femmes et hommes, en France. Sur papier.
La ségrégation a été abolie aux étazini et n’a jamais existé en France, les flics tuent encore des personnes racisées dans la rue. Donc qu’est-ce qu’on considère comme une société féministe ? Quand on ne tuera plus les femmes ? Au bout de combien de générations on pourra dire « on a désappris nos comportements » ?

Il y a aussi quelque chose que les mecs ont du mal à comprendre : on se bat aussi pour les libérer, eux, de la masculinité toxique. Une société féministe prendrait en compte leurs enjeux, car le « boys will be boys » est un des problèmes majeurs. En leur retirant ça, on les rend libres d’êtres qui ils veulent, pas seulement de la chair à canon ou un pourvoyeur d’argent à la maison sur lequel tout repose. Un homme a le droit de pleurer, d’être tendre, sentimental, d’aimer les enfants (de manière saine), il a le droit de vouloir rester au foyer s’il en a envie. Si on les y autorisait ce serait chouette. Non. Si ILS se l’autorisaient, ce serait chouette.


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Ça me semble assez casse-gueule de dire que la criminalité serait lissée par une société égalitaire. En vrai, je ne pense pas qu’on aura un jour de société réellement féministe. Et quand bien même demain matin on passait en matriarcat, il nous resterait à reforger l’ensemble de la société pour déconstruire les comportement.
Je pense ne pas voir ça de mon vivant, perso.

En fait pour que ça marche faudrait faire un « reset » de l’humanité, tout cramer pour repartir sur des bases saines #leodagan2022

Dans tous les cas, ce que je vois c’est que le sujet est encore assez peu exploré au niveau féminisme. Les femmes qui tuent, c’est pas bon pour le business quand on angélise les femmes. On est malheureusement pas plus des modèles de vertu, les mobiles sont parfois aussi futiles que pour les crimes masculins…et je pense qu’il faut vraiment adresser cette question au lieu de faire comme si.
La violence des hommes, on la connaît par cœur. Celle des femmes reste de l’ordre du mystère.

Je ne suis pas plus avancée sur la question, mais elle n’aura sans doute jamais de réponse. Je ne sais pas. Une société féministe rendrait bien service à tout le monde, mais n’éliminerait de toutes façons pas le crime. Aurait-t-on moins de féminicides ? Très clairement, oui. C’est tout ce que je peux affirmer.

Je me sens toute fouillis et j’ai pas mal de lecture sur le sujet, on en reparlera je pense… (edit : oui)