Heure de réveil : 5h01 (appel de la croquette)
J’ai passé une vraie journée de merde hier. Toi aussi ?
Ouais, 9 voix près pour la motion de censure. Mais j’avoue que la perspective d’une remontée du RN me faisait un peu peur. Là le gouvernement a eu sa petite claque. Je pense que ça ne changera rien dans tous les cas. Je sais pas. Je sais pas si j’y crois encore.
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Je me dis que l’électorat RN a bien des soucis, lui aussi, mais je ne sais pas y répondre car le Parti leur offre un argumentaire pré-programmé et que même avec une logique aussi claquée au sol, ça se tient et iels veulent y croire. Croire en quoi, après, bon.
Attends, je me désinfecte les mains et je sors les gants, on va voir ce que je peux en comprendre.
Parce que c’est un peu des gens de gauche qui ont porté la retraite à 60 ans, non ? Et les congés payés, et la sécurité sociale, tout ça ? Du coup, pourquoi manifester contre la réforme des retraites en étant d’extrême-droite ?
Et bien heu en fait pas trop, je mate Wikipedia sur l’histoire de la retraite et ça remonte à loin, sous Louis IV avec Colbert. Evidemment, c’était select :
🐦 « Sous l’Ancien Régime, 60 000 pensionnaires recevaient une rente de la part du roi. Celui-ci prélevait sur son trésor royal pour distribuer des pensions de cour, des pensions de charité, de mérite et de conversion, les pensions de retraite ne concernant quant à elles que 0,1 % de la population »
[…]
« Après la révolution de 1848, l’ensemble des fonctionnaires bénéficient d’une retraite, à partir de la loi sur les pensions civiles du 8 juin 1853 : Napoléon III généralise le régime de pension par répartition pour la fonction publique, l’âge normal de la retraite à cette époque étant de 60 ans (55 pour les travaux pénibles) et crée la pension de réversion. »
(Wikipedia)
Mais « en 1890, seuls 3,5 % des ouvriers âgés ont accès à une pension ».
Dans tous les cas, c’est un enjeu qui dépasse les classes politiques, je pense qu’on peut dire ça comme ça. Simplement, l’idée de devoir bosser jusqu’à la mort est pas fifolle, et ce pour n’importe qui. J’ignorais absolument l’histoire de la retraite jusqu’à présent.
🐦 « Après la défaite de juin 1940 et la mise en place du régime de Vichy, le nouveau ministre du Travail René Belin va reprendre les projets de la fin des années 1930 qui visaient notamment à substituer le principe de répartition à celui de capitalisation. Belin a intégré dans son cabinet deux spécialistes des retraites, Francis Netter et Pierre Laroque, mais ce dernier est révoqué à la suite de la loi du 3 octobre écartant les Juifs de la fonction publique. Les quatre dévaluations survenues depuis 1936 ont encore souligné la faiblesse des systèmes par capitalisation. Les travaux de l’équipe de René Belin aboutissent dès le 11 octobre 1940 à l’adoption d’un projet de loi par le conseil des ministres : « Les pensions de vieillesse et d’invalidité délivrées au titre des assurances sociales sont constituées selon le régime de la répartition. La liquidation, le service de ces pensions ainsi que les allocations… sont assurés par une caisse générale des pensions prenant la suite des organismes de gestions pour la vieillesse et l’invalidité… ». »
Pas vraiment de gauche…
🐦 « À la Libération, dans les attributions d’Alexandre Parodi, ministre du Travail et de la Sécurité sociale dans le Gouvernement provisoire de la République française figure notamment la mise en œuvre de la résolution du programme du Conseil national de la Résistance qui prévoyait « une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours ». L’organisation des retraites sera intégrée au système français de sécurité sociale dont la création est confiée en novembre 1944 à Pierre Laroque qui avait rejoint Londres en avril 1943 et qui est nommé « directeur des assurances sociales et de la mutualité ». Ambroise Croizat, communiste, ministre (du 21 novembre 1945 au 4 mai 1947) du Travail puis du Travail et de la Santé, dirige à ce titre la mise en place du système de protection sociale : assurance maladie, système de retraites, allocations familiales. »
En revanche, Balladur était bien de droite (attends, il est mort, lui, ou pas ?)(nope, pas mort) :
🐦 « En matière de réduction des pensions par rapport à la situation antérieure, selon une étude de la Caisse nationale de l’assurance vieillesse des travailleurs salariés publiée en 2008, pour six retraités sur dix, la réforme Balladur des retraites de 1993 a « conduit au versement d’une pension moins importante que celle à laquelle ils auraient pu prétendre sans réforme ». La différence moyenne est de 6 % pour l’ensemble de la population. Les hommes nés en 1938, par exemple, reçoivent une pension moyenne de 7 110 euros par an (hors retraites complémentaires), 660 € de moins que si la réforme n’avait pas eu lieu. Pour les générations nées entre 1945 et 1954, la baisse de la pension de base serait de 16 % pour les hommes et de 20 % pour les femmes.
En matière de durée d’activité, une autre étude, du ministère du Travail, réalisée en 2009 a estimé que depuis cette réforme, les hommes ont en moyenne repoussé leur cessation d’activité de 9 mois et demi et les femmes de 5 mois. En 17 ans, la durée de cotisation moyenne n’aurait donc augmenté que de 8 mois ou moins, compte tenu d’une arrivée plus tardive sur le marché du travail. La réforme de 1993, qui augmentait de 30 mois la durée de cotisation nécessaire pour avoir une retraite complète, aurait donc raté à 70 % son premier objectif : avoir plus de cotisations.
Ceci explique en partie que l’objectif principal, rétablir l’équilibre financier du système, a échoué. Le volume de cotisations n’a pas augmenté autant qu’escompté.
Ça, c’est intéressant. Qu’on nous oblige ou pas à bosser plus, des fois, le corps ne suit pas. No shit, Sherlock. Comme si le vieillissement jouait sur les performances professionnelles. Cela expliquerait l’ineptie profonde de la plupart des membres du Sénat ou du Conseil Constitutionnel qui feraient bien de décarrer à 55 ans, eux. Comment tu veux tenir un job ouvrier pendant 43 ans ? Ou alors on a trouvé un remède miracle pour soigner les lombalgies et personne ne m’a prévenue, moi qui partirai à 67 ans et qui ne suis plus dans le cadre de la France en Bonne Santé depuis un moment.
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Quand on devient vieux, on pense plus à sa gueule qu’à celle des gosses ? Je ne sais pas si ces gens ont des petits-enfants ou pas, mais la dissonance cognitive doit pas être simple à gérer. D’un côté tu votes des lois précarisant la population, de l’autre tu emmènes le mouflet à l’aquarium le mercredi après-midi sans jamais te demander ce qu’il lui arrivera dans 20 ans. Parce que tu t’en fous, « tu as déjà donné ». Donc tu es à la retraite intellectuellement aussi. Intéressant.
J’ai du mal à suivre cette logique, je l’avoue. On veut pour soi ce qu’on refuse aux autres, par exemple en ne touchant pas au régime spécial de retraite pour les sénateur-ices mais en sabrant tous les autres. Non, je ne découvre pas ce matin l’individualisme de droite, merci. Je m’esbaudis simplement sur cette capacité à en avoir rien à branler du reste du monde.
Normalement, j’ai dépassé les 40 ans, je suis sensée moi aussi devenir individualiste. J’attends encore, mais je perçois le repli intellectuel dans lequel se niche le conservatisme. Parce que j’ai travaillé, cotisé, notre foyer a réussi (par double coup de chance incroyable à chaque fois)(non, sérieux) à acquérir son logement en partie (car on doit toujours tellement de thunes à la banque), bah j’ai pas envie qu’on me prenne ma maison, par exemple. En plus je l’ai décorée, ça me ferait chier de devoir virer tous les autocollants des WC.
Je visualise le fait qu’on a construit quelque chose tous les deux, puis tous les trois, et j’ai pas envie de perdre ce quelque chose.
Mais le souci c’est que ça me radicalise encore plus au lieu de me rendre peureuse !
J’ai envie que tout le monde puisse accéder à ce que j’ai. Je ne possède pas des masses mais juste le logement c’est quelque chose. J’aimerais que tout le monde puisse avoir son propre logement, salubre et confortable. Mon avancée en âge ne se traduit pas par ce fameux « tu verras, quand tu vieilliras, tu deviendras de droite » et j’ai vraiment du mal à comprendre qu’on veuille garder à tout prix les bonnes choses pour soi. Je le saisis, intellectuellement, je visualise les mécanismes du repli, mais ça percute pas.
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Par exemple, comment avoir un enfant et s’en baleg du climat ? On crame déjà en hurlant à la mort quand il fait 37°C dans le salon, ça empire VISIBLEMENT d’année en année, on ne peut plus dire que c’est des anomalies météorologiques normales, mais agir pour le climat, ah, ça, non ! Ton gosse aura des étés à 53°C mais, hey, c’est plus ton problème.
Après, il y a la résignation.
Des fois, j’aimerais être résignée, ça serait drôlement moins chiant. La douce glissade vert la mort dans la paix de l’esprit animée par Hanouna. Ouais, ce serait reposant. En avoir rien à foutre des autres, ou de mon l’Enfant. Me dire qu’il a qu’à gérer ça, lui, aussi. Me flatter d’une vie remplie et productive sans jamais penser à ce qui viendra ensuite. Me laisser bercer par FIP jusqu’à la fin.
Hélas.
Je sais pas faire, donc je suis consumée par la rage et la révolte. Mon record de résignation est de 3 jours avant de repartir sur les chapeaux de roue. C’est trop peu pour me reposer, oui.
Je comprends pourtant qu’on se résigne. Les gens sont dans la rue ? Rien à battre, on a des CRS par cargaisons. Les gens font grève ? Les autres gens les traitent de preneurs d’otages parce qu’ils ne peuvent pas partir en vacances. J’ai raté l’anniversaire de ma maman et sans doute le replay à cause de l’essence (parce que le jet privé était trop cher), ça me fait chier mais je soutiens les personnes qui bloquent les raffineries. Leurs protestations, et je suis désolée, maman, valent plus qu’un aller-retour à Nancy.
C’est comme ça que j’ai été élevée, aussi. Par de fieffé-es syndicalistes qui font rien qu’à penser aux autres et aux conquis sociaux. Les enfoiré-es. A me gaver d’idées de lutte et de bien commun, d’ouverture et de passion éructante. Grr.
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Je me remettrais bien à faire des visuels pour expliquer un peu en quoi être égoïste à ce point c’est nul, mais c’est déjà fait. J’ai déjà tenté les stories Instagram et si c’était facile à réaliser, la diffusion a été vraiment médiocre.
Oui, c’est un de mes seuls talents. Je ne suis pas du tout très mobile en manif, je tombe j’en ai pour 3 mois d’immobilisation, je sais pas courir, qu’est-ce que je peux faire ? Ben pour le moment, j’écris des billets dans lesquels je me demande ce que je vais faire.
C’est déjà pas mal.