Heure de réveil : 5h06 (dèche de croquettes)
Il s’est passé un truc formidable hier. J’ai parlé très longuement à un collègue au téléphone. On a parlé harcèlement, ça nous a fait du bien. Ça a aussi remué pas mal de choses alors j’ai dit que je connaissais une meuf qui écrivait et qui aimait faire des enquêtes, au pire. Je la contacterai, on habite ensemble.
Après j’en ai rêvé, quasiment toute la nuit, mon réveil est assez difficile car en plus j’ai ankylosé de ouf toute la nuit donc j’avais juste des bribes visagières et des souvenirs de hurlements.
Je suis subséquemment un peu perdue. Et on est pas que 2 (on est beaucoup plus en réalité). J’ai découvert la souffrance de personnes avec lesquelles j’ai travaillé. Ma tricardisation m’a fait croire que le problème venait encore de moi, et moi seule. Je sais maintenant que je n’ai pas commis de faute, en tout cas, pas de faute professionnelle.
😬 C’est assez insupportable d’être punie lorsqu’on fait correctement son travail. Parce que je ne comprenais pas pourquoi j’étais mise à l’écart. Je pensais être trop mauvaise, trop malade, je me disais que j’assurais pas alors que les à-coups de la brutalité me massacraient intérieurement. Comment bien travailler lorsqu’on se pense incompétente et bien chanceuse d’avoir un travail malgré la maladie ?
👉 Faut VRAIMENT que j’arrête d’invalider systématiquement mes ressentis et hypothèses. Je savais que j’étais pas la seule, j’avais vu des accrochages, mais j’étais si isolée que dans tous les cas, personne ne partageait ce genre de choses avec moi.
Parce que, manifestement, mon cas est LOURD. Je comprends mieux la non-confrontation totale avec moi. Fallait pas que je découvre ce dossier.
🙈🙈🙈
Moi, j’avais dans l’idée que je me faisais des idées, puis que j’étais trop nulle, de toutes façons. Si personne ne me parlait, si je me retrouvais aussi isolée, c’était de ma faute, parce que je suis bizarre et malade et asociale.
Honnêtement, cette situation professionnelle a gravement impacté ma santé, physique et mentale. Et ce n’était pas de ma faute.
Pas de ma faute.
C’était pas parce que j’étais incompétente ou mauvaise et malade. Comment me faire confiance alors ?
😫 Simplement me considérer comme humaine aurait été chouette. Ne pas s’arranger pour poser les réunions à une heure où je récupérais l’Enfant à l’école. Ne pas me couper de toute source d’information pour me punir. Me permettre d’accéder aux événements sociaux au lieu de m’obliger à rentrer en bus pour ensuite se moquer de moi.
« Tu pensais arriver plus tôt ? HAHAHAHA »
Non, je ne pensais pas arriver trop tôt, vous m’avez fait aller au resto au pas de course pour 10mn de trajet de valide, alors que j’étais en canne, j’ai fini par suivre le peloton avec une collègue restée à mes côtés. Personne ne nous a attendues. J’ai marché trop vite et je me suis blessée sur le chemin, les risques du « resto tout près ». En sortant, je ne voyais déjà plus le cortège qui était bien en route, j’ai donc pris le bus. C’était ça ou rentrer chez moi. Donc non, sombre idiote, je n’ai pas pris le bus pour « arriver plus vite », et oui, j’évite de marcher alors que « le sport c’est bien pour ce que j’ai ». On appelle ça le handicap. Non, je ne peux pas « juste » marcher 10 mn comme ça sans me poser de question.
Je ne peux plus depuis que j’ai 20 ans, bande de vautours.
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Le souci c’est que ça m’a tout remis dans la tronche et je pense que ça commence à vaciller, là-haut. Se dire qu’on est en tort pour régler la dissonance cognitive une fois pour toutes permet de souffrir seule d’une faute imaginaire. C’est beaucoup, beaucoup plus simple de rejeter la faute sur la personne qu’on connaît le mieux : nous.
Bien faire son boulot et être sanctionnée, c’est ce qui s’est passé. Comment tu veux avoir des repères ensuite ? Comment savoir ce qui est normal et ce qui ne l’est pas ?
🦖 Et je me rends compte qu’une fois qu’on a réalisé que je n’étais pas une handicapée modèle mais une personne malade (c’était marqué dessus avec la Reconnaissance Travailleuse Handicapée, tu me diras) on s’est demandé comment libérer mon poste pour y placer un-e VRAI-E salarié-e.
Ce qui n’a jamais été compris c’est que je suis grave en dèche d’attention. Tu me dis que je bosse bien, je bosse encore mieux. Si tu me fais confiance, comme le faisait mon ancien responsable avant qu’on nous sépare (deux anar dans un même service, c’est le début de l’insurrection), je bosse comme jamais. J’aime travailler et je pense que ça se voit un peu, ici. Je ferais pas des enquêtes durant des jours et des nuits, gratuitement, si je n’aimais pas travailler. J’écris quasiment tous les jours sur cette page : je suis capable de fournir un effort soutenu et régulier. Chaque billet me prend entre 2 et 6h en fonction des recherches à faire ou pas.
Je suis CAPABLE 😱
🥦🥦🥦
Tu sais quoi ? Je pleure en relisant ma fiche de poste. J’ai apprécié travailler sur ce poste, je me suis même éclatée, j’ai appris plein de choses. J’ai envoyé bouler la parano, car je sais que j’ai tendance à me faire des idées (je dis ça, je dis ça, jusqu’à présent je ne me suis pas trompée), et j’ai bossé comme jamais. J’étais crevée, mais mon responsable me faisait des retours, m’apprenait des choses super intéressantes, on s’opposait parfois mais je l’estimais suffisamment pour savoir quand son idée était réellement meilleure que la mienne.
Comme on faisait un bon duo, on nous a séparés. Si je n’ai pas compris sur le coup la logique derrière le nouvel arbre de la hiérarchie du Flex, j’ai bien percuté quand je me suis retrouvée sans encadrement (ça à la limite…) mais aussi sans aucun « pouvoir » décisionnel. Personne ne validait mes décisions, même pas mon propre directeur, car il ne lisait pas mes mails.
« Trop long »
Mec, t’es à ça de découvrir que je détaille le problème quand je fais un ticket. Où, quand, comment, pourquoi, tu vois bien. Les tickets en deux lignes c’est l’enfer, il faut toujours préciser un maximum d’éléments pour donner des pistes de résolution, il faut faire des tests croisés, donner le résultat de ces tests croisés, etc.
Pis GENRE j’écris beaucoup 🙄
GENRE !
🐿🐿🐿
Donc ce matin, c’est un peu particulier.
Je dois aussi voir mon médecin dans la matinée, je vais lui raconter. Si une personne sait à quel point je n’ai JAMAIS simulé, c’est bien lui.
« Mais vous avez été travailler, hier ?
– Oui.
– Attendez, ça va pas, là, vous êtes en très mauvais état, on a dit qu’il fallait se reposer…
Parce que le psy joue très légèrement sur le physique. Je repoussais les poussées, feignant d’ignorer la douleur qui me défonçait, allant bosser jusqu’au bout du bout.
– Bon, je vous mets 10 jours.
– Oui mais j’ai une réunion vendredi…
– 7 jours ?
– Vendredi…
– Cette semaine ? Ah non. Non non, vous vous reposez. »
Les échanges étaient de cette teneur. Jusqu’à ce que je cède et qu’il m’arrête un mois, puis trois mois. Mon état physique et mon psychisme fragile me mettaient en danger. Je déréalisais au travail. Chaque matin, arrivant tôt, je me demandais d’où j’allais me jeter et ça m’occupait un peu. Je repoussais le moment de l’arrêt, chialant intérieurement, ravalant la douleur, pour ne pas pénaliser le service. Je faisais des mails récapitulatifs (évidemment beaucoup trop longs) la veille d’un jour où il était peu probable que, sauf miracle nocturne, je puisse me déplacer.
On a pas pris ça pour de la conscience professionnelle, non.
On a pris ça pour de l’absentéisme organisé.
Parce que c’est bien connu, les gens n’aiment pas travailler et sont de gros flemmards, bande d’assistés.
Ceci m’a appris plusieurs choses :
– Il ne faut pas être honnête, fais semblant de t’être blessée, personne ne comprend le sens d' »affection chronique ». Oups j’ai glissé dans la spondylarthrite, pardon.
– Quand tu as la canne, tu es malade, quand tu n’as pas la canne, tu es guérie.
– De toutes façons, les salarié-es mentent et veulent être payés à rien foutre.
– Et il faut continuer à forcer à mort sur le corps pour aller bosser, même si le forçage coûte des jours d’arrêt en plus.
Oui parce que quand on force, on se fait mal. Alors au lieu de 3 jours de repos en début de poussée, on a 10, 15 jours d’enfer.
🦥🦥🦥
Chuis fatiguée. Me remettre la tête dedans est une bonne chose, mais c’est épuisant. Mon cerveau passe en revue tous les événements depuis 2017 et, comme d’habitude, vient me parler de temps en temps en me présentant un autre souvenir traumatique comme un gosse qui ramène un ver de terre à sa mère.
J’aurais bien aimé être mon directeur, tiens, ça a l’air reposant de travailler lorsqu’on est soutenu par sa hiérarchie.