Heure de réveil : 4h28 (y’avait pu de croquettes)

Franchement y’a pas à dire mais lae scénariste de cette saison électorale étazunienne s’est bien arrachée pour nous faire du cliffhanger du tonnerre ! Quel suspense !

En tout cas, deux choses sont sûres :
🐟 Quel que soit le résultat, Donald Junior trépigne et éructe comme un enfant qui chouine que c’est même pas vrai.
🐟 Je vais faire un billet un peu léger, j’en ai besoin, c’est trop intense en ce moment.

En revanche on va se dire à dans 5mn avec plus de café parce que j’avais que des trucs trop compliqués à dire ce matin mais on est toustes à cran et du léger c’est pas si mal. Vais-je effacer ce paragraphe ? Non, parce que j’ai échoué lamentablement et que je veux montrer que j’ai quand même tenté le coup. Ce billet sera le billet du fail. Pardon.

Désolée, mais Spotify me propose un morceau qui s’appelle «Bipolarity» dans mes découvertes de la semaine, aussi, je peux pas laisser passer. Je peux pas. D’autant plus que je lis les gros titres en ce moment et que merde, merde, merde, merde. Voilà. Merde.

La bipolarité, la schizophrénie, la paranoïa, l’autisme et la dépression ne sont pas juste des expressions. Les autres pathologies non plus mais j’avais pas mon DSM-5 sous la main et «trouble de la personnalité borderline» ça cassait un peu le rythme de ma phrase. Le DSM-5 c’est l’annuaire (contesté) de la maladie mentale, sinon.

Tu as compris : on va encore parler de folie.

🦆🦆🦆

Ça me tue qu’on romantise à ce point la maladie.

🐯 Être bipolaire c’est pas juste être lunatique, aller bien puis pas bien. La bipolarité c’est les montagnes russes des émotions, mais sans être attachée. C’est flippant, c’est grave flippant, c’est une maladie qui fait souffrir sa race et qui te met à terre à chaque crise.

🐯 Etre schizophrène c’est pas «avoir deux personnalités» et ça ça me rend ouf, encore plus que d’hab. Merci les médias de parler de schizophrénie dès qu’une situation est trop difficile à décrire. Comme ça, maintenant, on pense que les schizos sont non seulement dangereuxses mais aussi victimes de dédoublement de la personnalité. C’est tellement imbécile…
Donc oui des fois ça arrive, mais c’est certainement pas ce qui définit le mieux la schizophrénie, qui compte un paquet de symptômes.

🐯 Être paranoïaque c’est pas être trop méfiant-e, c’est une souffrance continue. La sensation de ne pas pouvoir se reposer car «ça» te guette, «ça» attend le moment où tu t’assoupis pour attaquer. La menace, le danger permanent avec en prime une solitude extrême car personne ne croit que tu as réellement lu dans le journal un anagramme qui te disait que la Californie allait exploser.

🐯 Être autiste, c’est pas «se couper du monde». Plein d’autistes savent parler, je te jure. Y’en a même qui bossent, qui vivent leur vie et qui ont des enfants. Je ne supporte pas ce raccourci relayé lui aussi par les gros titres. «Une politique autiste» un jour, j’ai lu. Merde. Si les politiques étaient autistes je pense qu’on serait pas autant dans la merde en fait.

🐯 La dépression est le terme le plus courant, celui qu’on emploie presque toujours au lieu de «déprime». La déprime, ça se guérit. La dépression, non. On peut apprivoiser sa dépression, trouver des astuces pour gérer au jour le jour, mais on connaît la rémission, pas la guérison.

Je ne parle pas de quand tu dis «chuis parano» (moi aussi je le dis, j’avoue) mais surtout de ces petites formules qui passent dans les médias et qui véhiculent, banalisent, une conception totalement foireuse des pathologies mentales. C’est d’autant plus rageant qu’on en parle pas, par ailleurs, de la santé mentale. On en a des bribes quand il y a un incident, un crime, un fait divers insolite, mais sinon on sait que dalle.
T’as appris ce que c’était que la paranoïa au lycée ? Moi non plus.

Pixabay – CDD20

🍄🍄🍄

Ce serait pourtant VACHEMENT UTILE en ce moment de parler santé mentale.
On vient de reconfiner la France (confinement + couvre-feu, la fenêtre de tir est plus étroite que la lorgnette qu’un libertarien pour le fun dans ta vie), les gens n’en peuvent plus, iels ont peut-être déjà perdu leur emploi, craignent sinon de le perdre, les seules sorties sont encadrées, les directives gouvernementales incompréhensibles et contradictoires, notre politique de droite fait bien le taf par ailleurs, ni vu ni connu j’t’embrouille, je pense que pour pas mal d’entre nous on est bien au-delà de la simple déprime.
Sans déconner, y’a de quoi broyer du noir.
Dystopie de merde.
Tu vois, si on parlait santé mentale, on saurait que l’isolement tue. Je pense d’abord aux personnes à la rue, SDF, migrantes, qui ont de très bonnes raison d’être complètement traumatisées.
Lorsque je demande si «tout va bien avec cette petite pandémie», les neurotypiques ( = les gens pas fous) répondent avec hésitation. «Mh. Oui oui». Alors que tu lis la détresse dans leurs yeux. La honte de dire «Non, en fait je me sens mal, j’ai peur, j’ai envie de pleurer, j’ai besoin d’aide».

Les copaines neuroatypiques (les barges) vont me répondre «Bon, jusqu’ici j’ai réussi à surmonter ça et ça, j’ai augmenté un peu tel traitement avec ma psy, mais ça m’a épuisé-e, je ne sais pas pour la suite, pour le moment je regarde Buffy». Et entre gens fous, on s’entraide. On s’envoie des petits mots pour se demander si on tient le coup, on s’envoie des gif avec des chats parce qu’on sait qu’on est toustes sur la corde raide.

🐢🐢🐢

J’ai la chance d’être plutôt bien entourée, c’est un immense privilège. J’aimerais que chaque personne malade puisse se tourner vers ses amies sans risquer un «Oh ça va t’exagère, arrête ton cinéma».
En attendant, je connais mon psychisme et son fonctionnement mieux que quiconque, je sais quand je commence à dériver. Je me soigne, je compte sur mes proches et iels savent aussi que je suis présente en cas de pépin. Iels connaissent aussi mes signaux d’alerte. Je sais apaiser une personne en crise d’angoisse, même en soirée.

Mais, encore une fois, je suis une privilégiée de la maladie mentale : j’ai les moyens de consulter, de me soigner, j’ai un réseau soutenant, je me suis beaucoup beaucoup documentée sur la maladie mentale en général.
Si tu n’as personne, attends d’arriver à la fin du billet.

On sait comment on fonctionne, donc, fais-nous confiance.
Quelque part, je trouve qu’on s’en sort quand même plutôt bien, vu le contexte. On était déjà un peu cramées mais on sait aussi chercher de l’aide, on sait quand on est en zone rouge. Je dis pas qu’on VA chercher de l’aide, mais on est en conscience de notre naufrage personnel.
Assumer ça fait toute la différence au niveau soins. Lorsqu’on connaît nos zones de fragilité, on a plus de clés pour gérer des situations extraordinaires. On est déjà en vigilance permanente.

Je dis ça…mais toi et moi on sait bien qu’on est quand même les premières à morfler de la situation sanitaire. Je suis inquiète pour les copaines. On a beau être ensemble, il y a de quoi avoir très très peur.
Tout ce qui se passe en ce moment est comme un Armageddon au ralenti. C’est extrêmement angoissant, et comment se projeter dans ce monde-là ?

J’ai pas de réponse mais j’ai des cœurs. 3, comme les pieuvres.

Pixabay – CDD20

❤️❤️❤️

Si tu me lis et que tu es en panique tu peux m’écrire, d’accord ?
Le réseau, les groupes d’entraide, c’est ultra important, reste pas seul-e. On ne se connaît pas et tu as peut-être peur mais je n’ai mangé personne depuis 2014. Je ne te dis pas qu’on deviendra meilleur-e-s ami-e-s mais si je peux, je t’orienterai vers des endroits chouettes et on réfléchira ensemble à ce qui se passe dans ta tête. Si tu me lis et que tu connais des groupes et lieux safe je veux bien que tu nous envoie tout ça en commentaires, merci !

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Ok c’est trop mièvre pour moi, là, je viens de me surprendre à écrire une phrase de la win genre «ensemble on est plus fortes blablabla»
Mein gott.
Allez.
Pense à des trucs glauques et sombres, fous-toi du Cradle dans les oreilles, je sais pas, REPRENDS-TOI, MEUF !!! REPRENDS-TOI !!!

…nan c’est foutu je suis pleine d’amour aujourd’hui. Désespérant.