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Heure de réveil : 4h15 (chats)

CW : cishétéronormativité (même raison que d’hab : mes propos sont valables pour tout le monde, mais les mecs cis hétéro sont en supériorité numérique et ça rend l’inclusif moins compliqué à gérer)

J’ai pas passé une super journée, hier, mais ce matin c’est l’anniversaire de Cassandre, ma Moumoune qui a encore oublié de m’envoyer des cartes postales du Paradis des Chats. Elle doit trop s’éclater, y’a pâtée à l’infini là haut. J’arrive à penser à elle sans pleurer, ça fera juste 3 ans. Les chats, c’est important, même si ils nous miaulent dessus pour manger, même s’ils pissent sur le lit.
Des bisoux à ma maman et à mon frère qui ont perdu une Moumoune trop tôt, trop vite. Et bisou à toustes les propriétés de chats qui en ont perdu malgré tout l’amour du monde.

[Je n’ai pas suffisamment avancé sur Frederici pour ce matin, j’espère demain, mais cet aprèm j’ai…tatouage 🥳]

Ce matin, je vais continuer sur « Je suis un connard » parce que tout n’a pas été dit et je vais pas éditer mon premier article en douce.

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Il y a un truc crucial que j’ai oublié de préciser, même si ça apparaît en filigrane dans mon texte : dire « Je suis un connard » revient à faire porter toute la responsabilité des problèmes à l’autre. Dire « Je suis un connard » contient « Soigne-moi, ou sinon…je vais exploser et ce sera de ta faute ».

C’est comme quand je dis « Attention, je vais m’énerver » quand mon fils fait ses devoirs en râlant et en y mettant toute la mauvaise volonté possible. Je ne suis pas sensée m’énerver, c’est mon enfant. Donc je le menace et c’est de la mauvaise parentalité. Même si je suis blasée, j’ai pas à m’énerver sur lui. Je fais reposer ma propre impatience sur ses épaules.

Vu mon tempérament, je dois néanmoins le prévenir car selon mon humeur (par exemple si je suis en état mixte) je peux effectivement exploser à tout moment.

Mais je ne lui demande pas de me soigner. Il n’est pas psychiatre et s’il l’était, bon, déjà ça ferait de lui un sur-génie car il a 7 ans et vas-y pour sauter des classes en médecine, et il n’aurait pas à ME soigner, parce qu’on ne soigne pas sa mère.

Ni saon partenaire de vie, en fait.

🍄🍄🍄

Là, on touche quelque chose d’important.

On ne soigne pas ses proches. Même si ça marche, c’est le boulot le plus épuisant du monde, car on s’y investit personnellement. Un-e soignant-e n’a pas ce stress supplémentaire : iel ne connaît que nous et le non-investissement émotionnel facilite la thérapie. Un-e soignant-e a en général été formé-e pour ça, en plus.

Alors que quand tu as, par exemple (je cite un exemple que j’ai vécu, je ne TE vise pas) un mec qui te marave quand ça lui chante pour finir par pleurer dans tes bras parce qu’il est malheureux, l’enjeu est radicalement différent. Le soigner, crois-tu, va l’améliorer et éloigner le danger. Je suis désolée, mais cela ne fonctionne pas. En tout cas, pas avec les partenaires violents (psychologiquement ou physiquement ou les deux).

Et ASSEZ BIZARREMENT je dois l’admettre 🙄 les mecs violents sont souvent ceux-là même qui disent « Je suis un connard » pour se dédouaner. « Attention, je peux exploser à tout moment mais tu es prévenue alors la responsabilité de la suite des événements dépend de toi. » On l’a vu, c’est reporter sa propre incapacité à se gérer sur lae partenaire.

J’avoue, c’est super pratique. On menace, pour qu’iel reste sage, et on demande du care, de l’attention, de l’écoute. Ils nous laissent chercher pour eux la solution. Mon exemple ci-dessus avait eu une enfance absolument massacrée. Il n’en a jamais rien fait. Il n’avait jamais consulté qui que ce soit à l’âge de 23 ans alors qu’il a été déjà fait de la garde à vue pour des violences graves. Il me racontait sa vie, pour expliquer sa violence et tenter de la justifier. Et moi, qui ai pas eu une enfance de ouf non plus, je cherchais sur mon PC, avec la connexion que JE payais, dans l’appart que JE louais, des réponses sur la codépendance. Je profitais de ses escapades avec son ex pour chercher comment l’aider, oui. Moi, je pouvais m’enquiller 1L de vodka en une nuit sans difficulté, j’étais dépendante des médicaments, du shit, j’étais dans un état physique abominable, j’ai fait deux tentatives d’auto-internement pour ne pas faire de TS (ils m’ont jetée, après je suis revenue en ambulance), mais c’était lui que je soignais, pas moi.

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😬 QUE DE TEMPS PERDU !!!

Il m’a envoyé un mail quelque temps après la séparation, j’étais pétrifiée de terreur juste en lisant son nom. Ce qui suit risque de parler à beaucoup d’entre nous.

« Te perdre m’a fait comprendre que je devais faire quelque chose. Tu étais la personne la plus importante pour moi, je n’ai jamais vécu ça blablabla et je regrette ce que j’ai fait. Grâce à toi, j’ai compris qu’il fallait que je me prenne en main. Jamais je ne retrouverai quelqu’un comme toi. »

Traduction : merci d’avoir payé les pots cassés, je suis déjà avec une autre tandis que tu tentes d’échapper au PTSD, grâce à toi je suis devenu moins con.

Mais mais mais mais mais je t’emmerde, John Bob, je t’emmerde ! Tu as failli me tuer plusieurs fois, qu’est-ce que j’en ai à foutre que ça t’ait aidé, sérieusement, tu te prends pour qui ? Ah ouais, t’es deg car tu avais trouvé une humaine de qualité, soutenante et soignante, solution oriented qui bosse déjà en service après vente. Dommage. Quel dommage pour toi, hein ? Tu aurais tellement changé si j’étais restée, oui, j’y crois à mort.

Conneries. C’est quand on se barre qu’ils se disent « Tiens, j’ai peut-être un problème, finalement ». En général, lorsqu’ils sont à ce stade, la meuf d’après aura pas tout le boulot de débroussaillage à faire. Et tant mieux pour elle, j’ai envie de dire, je ne souhaite à personne de vivre ce que j’ai vécu.

Mais quelle inconscience du monde qui les entoure, sans déconner, on dirait des enfants, et encore, les enfants ça sait parfois mieux se contenir qu’un quadra en panique.

🦆🦆🦆

Tu vois, le mail plus haut ? C’était l’histoire de ma vie avant que je rencontre mon amoureux. C’est sans doute aussi l’histoire de ta vie avant de rencontrer des personnes moins malsaines.

« J’ai fait tout le boulot pour sa nouvelle meuf » et ouais. Et ouais. Et ouais. Tu la sens, l’arnaque ?

Parce qu’il n’a pas été soigné par magie avec la rupture. Il aura peut-être réfléchi, dans le meilleur des cas, mais c’est la blessure narcissique suivant la rupture qui l’a «  » »soigné » » ». En général, la nouvelle partenaire trouvera que heu, il a pas changé par magie, c’est toujours un gros boulet. Bah vi. Il est si malheureux qu’il décide de suivre une thérapie pour calmer ses accès de violence, tu crois ? ABSOLUMENT PAS, et je suis convaincue qu’il ment quand il dit ça.

Mon ex avait des problèmes monumentaux, diverses addictions et un déni formidable. Et genre pouf pouf ? Non.

Il m’a dit « Ouin ouin » (c’est le résumé de plus haut) parce qu’il veut avoir encore une emprise sur moi. Lorsque je me dis « J’ai fait tout le boulot » je me dis « …on serait restés ensemble ». C’est ce qu’il sous entend en disant que tu l’as aidé à grandir.

« Quel dommage qu’une autre en profite et pas toi »

Zéro manipulation, bien évidemment. Le mec t’écrit forcément sincèrement, pas du tout pour se venger en te faisant croire que tu rates une version améliorée de lui 🙎‍♀️ et mon cul c’est du Teflon.

🤖🤖🤖

Et nous, on y va. C’est ce que la société attend de nous : qu’on répare les personnes qu’elle endommage. Ça fait partie des capacités supra-normale des femmes, au même titre que la capacité à entendre bébé pleurer la nuit ou reconnaître ses hurlements à 500m.

C’est en ça que le « Je suis un connard » m’ulcère. La personne connarde pourra tourner la page en entamant une nouvelle relation tout aussi problématique, tandis que toi, tu ramasses tes morceaux et tu chiales. Il y en a plusieurs, plein, qui vont comme ça de relation en relation, épuisant leurs partenaires, les exploitant jusqu’à la moëlle parce qu’ils ne veulent pas voir leurs problèmes en face.

Puis si tu pars, tu l’abandonnes, même si c’est lui qui s’est barré. Tu as la culpabilité de ne pas l’avoir guéri et celle de refiler le bébé à une autre personne. Honnêtement, j’ai eu peur pour les futures compagnes de mon ex. Je suis convaincue qu’il n’a pas changé d’un iota, ce qui veut dire que d’autres ont essuyé sa colère et ses coups.

Mais, hey, il avait prévenu « Je suis un connard ».

🐳🐳🐳

J’en ai plein le cul de cette déresponsabilisation. Si tu sais que tu es un connard, et bien tu travailles sur toi, bonhomme, tu fais pas subir tes humeurs à tes compagnes. Si vraiment tu penses être un type dysfonctionnel, prends-toi en main, je sais pas. Si tu sais que tu as un pneu crevé, tu roules pas avec, tu le changes, parce que c’est dangereux. Bah c’est pareil. Ta connerie est dangereuse pour taon partenaire, alors gère-toi. Tu embarquerais toute ta famille pour faire 500 bornes avec un pneu à plat ? Moi non, mais je triche, je ne conduis pas.

Aussi, attention en capslock : CE N’EST PAS DE TA FAUTE SI TON MEC NE CHANGE PAS.

Quel ratio bénéfice/risque pour lui ? Quel intérêt aurait-il à changer alors qu’il réussit à te soumettre juste en disant que c’est un connard qui a des problèmes ? Et puis genre toi, moi, nous, on a pas des problèmes aussi ? Est-ce qu’on attend un quelconque support ou de l’aide ? Franchement ?

« Je suis un connard » dédouane de toute responsabilité, dans son esprit à lui, on l’a vu dans le billet précédent.

👾👾👾

Travailler sur soi, c’est pas un truc de fragile. Travailler sur soi, c’est indispensable et nécessaire tout au long de sa vie. Et pourtant.

Il est plus confortable de vivre en menaçant l’autre, consciemment ou non. Ça rejoint la thématique de l’insécurité affective générée par les partenaires pour soumettre autrui. Ça renforce la vigilance de la victime, ce qui va l’épuiser psychologiquement car elle doit comprendre les arcanes et les mystères de ton tempérament, tout en craignant de réveiller la Bête, tout en gérant ses propres états d’âme.

C’est un joker super utile car quasi systématiquement couplé au « J’ai des problèmes ».
Écoute, chaton, moi aussi j’ai des problèmes, et pas qu’un peu. Est-ce que je terrorise ma famille pour autant ? Non.

Et ça permet en plus de ne jamais avoir à reconsidérer sa vie en face. Tout est balayé sous le tapis de la connarditude. « Je suis comme ça, voilà ». Pas besoin d’introspection, car il sait qu’il est un connard. Technique de pro. Déporter les problèmes sous « Je suis un connard » pour ne surtout pas se regarder en face.

🧶🧶🧶

Je n’enjoins personne à suivre une thérapie, tout le monde n’en a pas les moyens, on peut aussi, comme c’est le cas pour moi, avoir connu trop de déboires avec des mal-soignant-es.

Mais le minimum, c’est d’essayer d’apprendre à se connaître et de réfléchir aux choses qu’on nous dit. 

Sortir de la case « connard » oblige à s’assumer, beaucoup ne le souhaitent pas. On l’a vu, le bénéfice est supérieur au risque car on fait appel aux émotions de l’autre pour resserrer l’emprise. Puis soulever le voile de sa connarditude mène à de mauvaises surprises, le jeu n’en vaut pas la chandelle, faut croire. Autant faire semblant de s’assumer en se proclamant roi des connards. Dire ça donne l’illusion d’une capacité d’introspection. Il a déjà reconnu le problème principal et amorcé…amorcé quoi ? Amorcé que dalle, ouais !

Récemment, mon mari m’a dit « J’ai merdé, je m’excuse » et il a géré derrière. J’ai beau le connaître depuis 15 ans, je suis restée sur le cul, comme à chaque fois. J’ai pas été habituée à ce qu’un mec reconnaisse ses erreurs et fasse son possible pour réparer. Je reste assez incrédule devant ce genre de choses. Ce genre de choses qui arrive, pourtant. Oui, je ne suis pas misandre, j’ai des amis qui sont aussi des hommes cisgenre, je te jure, y’en a même qui lisent ce billet.

😱 Et si cesser de se proclamer connard et cesser de valoriser cette fausse prise de conscience permettait une réelle ouverture à l’introspection ?

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Plus sérieusement, ce n’est pas à la personne qui partage ta vie de gérer ton bien-être émotionnel. Sa capacité est limitée dans le domaine : elle peut t’aider, t’accompagner, mais pas te soigner. C’est comme la pédagogie féministe : ce n’est pas à nous d’aller chercher « féminisme » sur Google. On a fait comment, nous, d’ailleurs ? On est tombé-es sur des groupes féministes par pur hasard ? D’un coup on s’est dit tiens, j’ai envie d’embrasser un militantisme qui me fera du mal ? Nous, on s’est débrouillé-es. Si l’intérêt est préexistant, on trouve ce qu’on cherche. Un cisdude VRAIMENT intéressé par le féminisme, ou VRAIMENT intéressé par l’amélioration de sa qualité de vie, saura trouver les ressources.

Après tout, ils se pensent plus intelligents, non ? Pourquoi confier leur santé mentale à des hystériques ? C’est un peu con quand même. Un peu heu…perplexifiant ? Certains d’entre eux ont BAC+25 mais ne sont pas capables de chercher des trucs dans les internettes ?

Allez.

Tombe le masque, coco, on sait bien que c’est de la pure mauvaise foi.