Print Friendly, PDF & Email

Heure de réveil : 1htruc, 2hmachin, 5h32 (ankylose, ankylose, chats)

Je suis accompagnée par « Bring Back the Funk » de PrototypeRaptor ce matin :

If you’ve got the feeling, if you’re receiving
If you’re moving, and your body’s grooving
If you’ve got the feeling, if you’re receiving
If you’re moving, and your body’s grooving
If you’ve got the feeling, if you’re receiving
If you’re moving, and your body’s grooving
If you’ve got the power, to make the music louder
Boost the bass up a bit
Bring back the funk

Donc ça compense.

🐳🐳🐳

On parlait cheveux hier, parce que j’ai fait ma méga routine de soins aka « 3h dans la salle de bains comme dans les stéréotypes, masques aux couleurs improbables compris ».

Ma peau et mes cheveux changent avec l’âge, c’est assez terrifiant. Je passais aussi 3h dans la salle de bains à 20 ans, d’accord. Mais merde.

Et Fanny m’a parlé de la perte de ses cheveux post accouchement. J’espère du plus profond de mon cœur que ça ne touche pas toutes les personnes enceintes, parce que ça fout un coup au moral, limite à comprendre les mecs qui ont peur de la calvitie. Durant la grossesse j’avais les plus beaux cheveux du monde (et un masque de grossesse aussi, qui n’est jamais vraiment parti)(un masque de grossesse ce sont des zones rouges/marron sur tout le visage, exactement comme un masque, c’est dû à l’afflux sanguin je crois).

Puis j’ai pensé au reste, à tous ces petits « détails » de la grossesse qui ont rendu la mienne infernale.

Les insomnies.

Les jambes lourdes (j’ai largué 10kg de flotte post-partum)

Les jambes lourdes et sans repos qui causent les insomnies.

Les douleurs, mein gott, les douleurs, le bassin qui bouge, le mal de dos.

La fatigue intense du premier trimestre.

L’impossibilité de prendre tout mon traitement.

Bref.

Lorsqu’on dit d’une femme enceinte qu’elle est en position de vulnérabilité, je le crois. Je n’ai jamais vécu un tel moment, et je ne souhaite plus le revivre, fort égoïstement pour le bien être de mon fils unique comme me le fait remarquer l’ensemble de la société. A deux, c’est mieux. J’ai à peine survécu au premier alors à un, c’est déjà bien.

« Petits maux » mais va chier, « petits maux » mon cul, ouais !

🐣🐣🐣

Faut vraiment avoir connu cet état pour capter l’ampleur de l’impact sur le corps et le psychisme de la personne qui porte lae futur-e reloute du Kinder Bueno. Avant, je pensais que c’était pas si pire, 9 mois dans une vie (sauf qu’après les 9 mois tu as un nourrisson à demeure, et tu es obligée de t’en occuper au moins 18 ans), maintenant JE SAIS. Oh oui, je sais. Vacherie. Ouais bien sûr que je sais. Et je n’ai subi ni fausse couche, ni complication, ni prématurité de l’accouchement, j’ai eu le mode enfant en pleine santé après un accouchement lambda. Pensées pour les copaines qui ont vécu ça. Personne ne peut imaginer (même pas moi).

« Mais tu portes la viiiiie cay beauuuuu » nan c’est beau par tranches de 10 mn une fois de temps en temps, je te jure.

Je ne vais pas détailler les subtilités que personne n’a envie d’entendre (pieds en parpaing, mycoses et autres joyeusetés physiologiques de cay beau la natuuuure), après tout c’est « que 9 mois ».

C’est clairement un état dans lequel tu es le plus vulnérable, oui. Par ailleurs, certaines particulièrement chanceuses voient leur conjoint péter un câble lors de la grossesse ou en post-partum.

🐦 « Dans la plupart des couples, la communication et la négociation permettent de régler les conflits sans atteinte à l’intégrité physique et psychologique des partenaires. Toutefois, dans certaines relations, le conjoint ou la conjointe essaie de prendre le dessus sur l’autre et utilise la violence pour résoudre les conflits.
La période de la grossesse est un moment où certaines femmes subissent de la violence conjugale. En fait, une femme sur 10 rapporte avoir subi un ou plusieurs épisodes de violence dans la période entourant la grossesse. Dans la majorité des cas, la violence conjugale se poursuit après la naissance du bébé. »
(Institut National de Santé Publique du Québec)

👾👾👾

On va citer Muriel Salmona, même si elle est controversée (notamment vis à vis de ses positions abolitionnistes, elle a sans doute un doublé un peu transphobe, ça va bien ensemble en général)

🐦  » La grossesse est une période de vulnérabilité qui (comme dans le cas des mineurs) autorise la levée du secret médical pour faire un signalement aux autorités judiciaires.

Les femmes de 15 à 45 ans (période qui correspond aux années de procréation) ont déclaré des taux de violences plus élevés que celles de plus de 45 ans, (enquête canadienne, Ottawa, 1999). Le taux de violence est de 6,6 % pendant la grossesse en cours, 86,1 % de ces femmes avaient déjà subi des violences conjugales, près des 2/3 (63,9%) des femme ont déclaré que la violence s’était aggravée pendant la grossesse (Stewart,1993). Chez les femmes qui ont déclaré des violences pendant leur grossesse, 90% ont subi des violences dans les 3 mois suivant l’accouchement, le nombre de violences ayant augmenté après la naissance (Muhajarine,1999).

Les violences débutent souvent au cours d’une grossesse et les femmes victimes pendant leur grossesse ont plus tendance à signaler des actes de violence «extrêmement grave» : 40% des violences conjugales ont débutées pendant la grossesse, les femmes victimes enceintes étaient 4 fois plus nombreuses que les autres femmes victimes à dire qu’elles avaient subi des violences «extrêmement graves» (coups, strangulation, menaces de mort par armes, agressions sexuelles), 45% des femmes victimes de violences ont subi des blessures physiques dont 10% ont déclaré avoir souffert de lésions internes et subi une fausse-couche (enquête nationale canadienne auprès de 12300 femmes, 1993).

Les violences conjugales pendant la grossesse peuvent avoir de graves conséquences sur le suivi, le déroulement de la grossesse, le travail, l’accouchement et le post-partum. Les violences sont aussi à l’origine d’assez nombreuses demandes d’IVG. »
(Citation du site Mémoire Traumatique)

Faut avoir pas de face pour commencer à tabasser durant la grossesse, hein ?

Et après on fait des guides pour papas extrêmement infantilisants en leur disant « votre femme va vous demander d’acheter des fraises, faites-le si vous tenez à la vie », sans vraiment prendre en compte les risques liés à une conjugalité bancale.

Les résidus de fond de poubelle qui se décident durant la grossesse choisissent parfaitement bien leur moment, n’écoutant que leur courage, ils violentent une personne en situation de faiblesse. Et on nous demande, à nous, de respecter les égarements des futurs pères, parce que pour eux, c’est un chamboulement, TU COMPRENDS PAS ?

Ok, chez moi ça touche pas, vu que je n’ai pas grandi avec mon père. Parce qu’il s’est replié sur lui-même jusqu’à ce que ma mère se casse de guerre lasse. Ce que ça m’a appris, c’est qu’un père n’est pas forcément aussi engagé qu’une maman. Il peut prendre ses valoches, la caisse, se tirer aux Bahamas s’il le souhaite. L’inverse existe, mais c’est rare. Honnêtement, je n’ai connu aucun cas dans mon cercle de connaissances (et je tiens un groupe de parentalité féministe donc du témoignage, j’en ai lu).

🌼🌼🌼

Les conséquences qu’une mère indigne connaît n’ont rien à voir avec les pires brutalités que peux commettre un connard durant la période périnatale. Attends, t’es daronne maintenant, c’est toi qui es à 100% responsable de chaque pétouille dans la soupe. Tu allaites ? Trop proximale. Tu n’allaites pas ? Trop distante. Tu es bienveillante ? Trop laxiste. Tu es bienveillante mais faut pas déconner, Jean-Kévin, on ne découpe pas les rideaux pour s’en faire une cape ? Trop stricte.

Tu n’as pas récupéré le corps d’avant ta grossesse ? Bah qu’est-ce que tu fous ?

Tu es fatiguée ? Pffff moi je connais une mère de 6 enfants qui gère bien mieux que toi !

Honnêtement ?
J’ai pas récupéré mon corps d’avant, non, j’ai mille fois plus de stress et de responsabilités et si ça merde, c’est pour Bibi. C’est toi qu’on appelle quand ton enfant est malade à la crèche, même si tu es en second contact sur la fiche du gosse. C’est toi qui gères souvent les entrées/sorties d’école, les papiers, les devoirs, le bain, l’achat de vêtements et de ces chaussures pour ces petites personnes qui deviennent de moins en moins petites avec le temps, ayant idéalement une poussée de croissance après que tu aies changé sa garde-robe.

Ouais, t’as de quoi perdre tes cheveux.
J’ai un enfant qui est (forcément) plus autonome qu’avant et un conjoint qui fait des efforts et assure sur pas mal de trucs, mais le principal de la charge, on va pas se mentir, elle me retombe dessus.

Ouais, t’as de quoi avoir de nouvelles rides et des double cernes en plus des cheveux.

Du coup je déprime donc je mets des chatons. On reste dans le thème.

🥨🥨🥨

Puis ça revient jamais comme avant, hein ? T’es parent-e à vie, que tu le veuilles ou non. Même après une vie d’absence, j’ai dû aller au tribunal de Mende (Lozère, 6h de trajet en train et bus) pour avoir à esquiver le paiement de l’EHPAD de mon père. Alors qu’il ne nous a pas élevés et qu’il n’avait qu’un intérêt très limité pour ses enfants, on a dû faire valoir ça devant une Juge. T’es enfant à vie aussi. Lui n’a pas été au tribunal pour se débarrasser de nous. Il a juste fermé sa vie, et c’était plié. Ma mère, ça aurait été plus dur, elle était parent 1.

Quand on me demande pourquoi la passion tatouages alors que ça reste à vie, je dis les enfants aussi, ça reste à vie, merci, au revoir.

(Je te montrerai mon tatouage Petit Poney quand il aura fini de cicatriser, promis)

 

🐟🐟🐟

En gros, ce que je veux dire c’est qu’une personne enceinte traverse des trucs au delà de l’imaginable. On DONNE notre corps, et pas que temporairement. On DONNE notre énergie, notre temps, notre peau, nos cheveux et ongles, et personne ne nous les rend. Ouais c’est un peu l’arnaque.

J’ai vraiment eu le sentiment de délivrer un morceau de moi en accouchant. Un morceau vachement important mais qui ne serait plus jamais dedans moi. Un morceau que je confie aux bons soins du monde. Et on vit dans un monde de merde en plus, lorsque je pense à l’avenir, je ne pense pas à moi, je pense à lui et ses étés à 53°C quand je serai incinérée depuis longtemps.

J’ai beau retourner le truc dans tous les sens, je pense qu’il est impossible de concevoir l’étendue de ce don en n’ayant jamais porté un embryon ou un fœtus, amené au monde ou pas. Personne ne peut comprendre la profondeur de ce don. En devenant mère, j’ai gagné un mouflet en bonne santé, mais j’ai aussi beaucoup perdu, et pas qu’en cadeaux d’anniversaires. J’ai un fil à la patte pour toute ma vie. Un fils à la patte que j’aime plus que tout au monde, entendons-nous bien. Il peut détruire mes affaires, me frapper, me crier dessus ou me réveiller en pleine nuit, je l’aime à en crever. Pour lui, je fais des choses qui me semblaient inimaginables avant, une sorte de dévotion aveugle et permanente qui me fait constamment dépasser mes propres limites.

Pour lui, je fais des allers retours à l’école, 2,7km par jour quand mon cher et tendre ne peut pas prendre le relais. Je marche en ayant des douleurs abominables parce que je ne peux raisonnablement pas dire « allez j’y vais pas, il trouvera bien le chemin tout seul ». Je me lève ankylosée à 2h32 du matin quand il a fait un cauchemar, bravant la douleur de mon bassin courroucé devant tant de précipitation, de mes pieds qui ne savent pas encore qu’on est passés en position verticale, et j’y vais alors qu’il pense avoir perdu une peluche qui est à 5 cm de son visage.

☕☕☕

Alors j’écris ça pour toutes les personnes qui ont porté un enfant. Franchement, t’es badass. T’es pas faible ou fragile, t’es badass. Si tu as mis un terme à la grossesse, tu as tes raisons et tu es concernée par la badasserie. Les personnes childfree sont aussi badass de transgresser cette loi invisible de la procréation comme passage obligé pour chaque personne porteuse d’un utérus.

On se fait grave arnaquer, en menant une grossesse, et on le sait. On ne sait pas à quel point, sauf si on a déjà enfanté préalablement.

Surtout…il va falloir que le monde comprenne que ce n’est pas une obligation contractuelle. C’est pas juste « t’as qu’à faire un gosse » ou « on est toutes passées par là », non. C’est chiant et impactant. Donc si tu n’en veux pas, franchement, je comprends d’autant plus que je vois précisément ce que tu ne veux pas vivre, et c’est ok. Pis si tu n’as pas une parentalité joyeuse et épanouie, c’est pas une défaillance de ta part, tu fais ce que tu peux. L’épanouissement maternel est un leurre, un piège pour te contraindre à trouzmille niveaux différents.

Un piège dont on devrait avoir les clés en permanence sur nous.