Ce matin, mais on va parler de la considération interne au boy’s club.

Ou comment les hommes cis entre eux se vouent plus d’amour et de respect qu’ils n’en montrent envers les femmes.

Table des matières

Partie 1 : découvrir le « désir homosocial« 

Je suis en train de lire ce papier de Virginia Cooper et Sue Kinsey sur les boy’s clubs universitaire au Royaume-Uni, publié en 2012.

🐦 Objectif – L’objectif de cet article est d’explorer la nature et le pouvoir du boys club universitaire.
Dans de nombreuses organisations, la significance politique du boys club passe largement inaperçue et non reconnue. Pourtant, la façon dont les collègues masculins se lient intimement les uns aux autres, parfois appelée désir homosocial, est cruciale pour leur réussite à obtenir et à conserver le pouvoir au travail.

Conception/méthodologie/approche – Des données féministes, poststructuralistes, ethnographiques, qualitatives et longitudinales ont été recueillies sur une période de fin de cinq ans auprès d’universitaires masculins et féminins dans une université britannique.

Résultats – Le boys club est toujours une caractéristique puissante des universités britanniques. Leur invisibilité apparente dissimule la manière dont elles peuvent promouvoir et maintenir les intérêts masculins dans une myriade de voies, y compris la sélection et la promotion. Ces conclusions ont des résonances pour toutes les organisations. Limites/implications de la recherche – La recherche de l’intimité entre les collègues masculins nécessite un travail de terrain intensif en temps et un accès privilégié aux hommes qui interagissent les uns avec les autres.

🔸 On va donc lire ça et explorer ce qu’on va trouver.

🐦 Nous utilisons la métaphore du « boys club » pour désigner les discours et les pratiques partagés entre les hommes qui institutionnalisent la domination des hommes sur les femmes (Bird, 1996), mais qui restent cachés ou sont présentés comme des interactions sociales inoffensives.

🔸 Citation dans la citation :

🐦 […] la masculinité, dans la mesure où ce terme peut être brièvement défini, est simultanément un lieu dans les relations entre les sexes, les pratiques par lesquelles les hommes et les femmes s’engagent dans ce lieu et les effets de ces pratiques.
(Connell (1995, p. 71))

Ce Boy’s Club s’appelle « Le Cercle de la Garnison » stp 🤣

Quels sont ces clubs ?

On parle ici de Boy’s Club, au Royaume-Uni, alors je pense au Bristol Social Club Moins Le Socialisme, club masculin non-mixte depuis 125 ans. On nous fait chier avec trois groupes non-mixtes mais eux décident de trucs et de machins importants à huis clos.

List of gentlemen’s clubs in London (Wikipedia)

Fun fact : quand tu cherches un club similaire en France, tu as des bars gays. Mais quand tu cherches un peu mieux, tu te rends compte qu’on en a. Evidemment. Mais ça m’a fait rire bêtement, je m’attendais à des canapés en cuir et j’ai trouvé des gens en cuir. Passons. C’est le matin.

🐦 Car ici, les femmes, épouses ou non, ne sont autorisées qu’au titre d’invitées de ces messieurs.  » Cela s’est un peu modernisé. Maintenant, nous avons des femmes qui viennent au restaurant et en chambre, mais seulement si elles sont accompagnées « , nous explique-t-on sous couvert d’anonymat. Que justifie un tel règlement en 2015 ? La  » tradition « , car  » cela fait plus de cent ans que c’est ainsi « . Les membres, surnommés les  » travailleurs « , sont des financiers et des avocats qui ne désirent pas se retrouver en présence de femmes seules, parce que  » l’ambiance ne serait pas aussi familière, et qu’ils préfèrent rester entre eux « . Pour eux, le club est un « deuxième chez soi », un lieu qui permet de  » fuir la maison pour se retrouver devant un jeu de cartes ou un verre « . Ou pour déjeuner et cultiver son réseau entre hommes issus du même sérail.
(Madame Figaro, ce brûlot féministe)

🔹 Quand j’étais petite, j’ai été élevée avec une Mamie qui râlait parce que mon grand-père n’était jamais là. Il allait « au bistrot avec ses copains » et la vanne c’est qu’avec lui, elle ne pouvait jamais faire de soufflé car on ne savait pas quand il rentrerait.

Cette manière de fuir le domicile m’a toujours interpellée. C’était bien, pourtant, chez lui, en plus il n’avait même pas à faire à manger ! J’ai mis ASSEZ LONGTEMPS à comprendre qu’il était pas forcément toujours « au bistrot » et que ses déplacement professionnels n’étaient pas toujours professionnels. Mais je ne comprends toujours pas ce besoin viscéral de fuir le domicile. Genre t’as un boulot stressant, tu fuis le boulot pour rentrer chez toi, mais à la maison, il est où, le stress ?

Mon grand-père était marié à une prof d’Arts Ménagers. Sa maison était toujours impeccable, du sol au plafond. Ma grand-mère cuisinait bien et avait totalement l’esprit mère au foyer des années 50. Ils avaient deux filles qui ne cassaient pas tout, qui travaillaient bien à l’école…

Un besoin de liberté ?

Mais lui avait besoin de liberté, tu comprends ? Parce que ma grand-mère l’engueulait (je l’aurais engueulé aussi), parce qu’il était visiblement plutôt assez volage et qu’il travaillait beaucoup trop. Donc, pour se détendre de sa journée de travail sans sa femme, il allait « au bistrot » sans sa femme. Parce que ça le faisait chier. J’ai assisté à la logistique des repas de fêtes, sa seule implication était de choisir le vin. Franchement, moi, tu me dis que je rentre dans une maison clean avec à manger, je vais pas « au bistrot ». Surtout, je me demande comment les libertés de sa femme ont été gérées.

Alors ok, ma Mamie était pas commode (et pas armoire Lorraine non plus), elle avait son caractère parfois acide, passif-agressif, ses silences vexés et plein de choses qui la rendaient difficile à vivre. J’ai vécu avec elle à 25 ans pour bosser mon second BTS, je l’adorais et l’adore toujours, mais ouais, elle était reloue.

🌴 Sauf qu’il avait deux filles, aussi. Mais son bien-être de travailleur à responsabilité épuisé comptait plus que le reste. Je suis désolée si tu me lis, maman, mais c’est la seule réponse que j’ai. Parce que je me vois mal, moi, larguer tout le monde et aller « au bistrot » en laissant époux et enfant se démerder. Je dis pas que j’aimerais pas, parfois, mais je ne pense pas en faire une habitude.

En résumé, un homme fuit sa femme pour se rendre dans un endroit pour s’alcooliser avec ses copains, qu’il voit plus souvent que sa femme, du coup. Je n’ai aucun mal à croire que ça ait pu tourner vinaigre. Parce que plus il fuyait, plus elle se sentait en insécurité affective (oh oh oh serait-on dans une relation cis-hétéro ?), plus elle se sentait en insécurité affective, plus elle était agressive, et plus lui fuyait. Ma grand-mère était plutôt une belle femme, très soignée, soucieuse de son apparence et vivant extrêmement mal l’avancée en âge et les relations qu’il avait avec d’autres femmes. Lorsque j’ai été à ses funérailles, j’ai aussi été dans la maison, et j’ai trouvé son journal intime. Un fucking carnet alimentaire, arrêté 4 ou 5 jours avant son décès. Elle avait 95 ans. L’insécurité affective, encore, toujours.

🤷‍♀️ Moi, j’ai développé un non-affect : si j’aime pas, je peux partir quand je veux. Les gens sont libres de mener les activités qu’ils veulent, mon mari pourrait totalement avoir une double vie. J’ai pris le contrepied de ce que je sentais sans savoir dire les mots « l’amour ça fait mal et j’ai peur de la perte ».

Au grand étonnement de ma Mamie, qui adorait mon époux, point de bistrot, point de coucheries, des adultes qui dialoguent et qui se font toujours confiance après 5 ans. Lorsque je me suis mariée, elle m’a dit « Bon, tu sais…maintenant que tu es mariée…ton mari va aller voir ailleurs, et c’est normal. » J’ai dit « No way » elle a dit « Ooooh, tu verras bien, ma cocotte ».

Je veux pas dire, mais ça fait 10 ans que j’attends, maintenant.

Exclusion des femmes

🐦 À l’Automobile Club de France, club de luxe implanté place de la Concorde, les femmes n’ont le droit d’accéder qu’à certains étages et seulement en tant qu’invitées. Même confirmation par téléphone pour le très huppé Jockey Club, « QG » des aristos. La raison ?  » C’est un club de gentlemen « . Les femmes ne peuvent y être membres, parce que, nous dit-on, cela fait partie des codes, « comme le fait de ne pas pouvoir venir en baskets ou en jeans « . Le Nouveau Cercle, où se retrouvent les passionnés de jeux, est également réservé aux hommes. Un employé explique qu’il s’agit, encore une fois, d’une tradition et que les membres ne souhaitent pas la changer. « Ces messieurs aiment refaire le monde entre eux et nous avons quelques manifestations organisées avec ces dames, comme le dîner des épouses ou le prix littéraire », ajoute-t-il.
(Madame Figaro, ce brûlot féministe)

🦩 Les femmes perturbent avec leur sexe béant affiché sous leur nez. Elles perturbent sexuellement car elles ne sont qu’un enjeu sexuel. Que dire de plus que ça ? On est tellement réifiées que nous sommes une fonction : la baise. Deux éventuellement, ou en cas de pas de bol : les enfants.

Une femme ne peut pas penser, ne peut pas parler, ses idées seront perçues comme ridicules ou pathétiques, même si Jean-Nuisible répète strictement la même chose et se fait applaudir juste après (Si toi aussi t’as été en réunion dans ta vie tape dans tes mains 👏).

Un enjeu sexuel ou procréateur, c’est tout. C’est exactement ce que disent ces règles d’exclusion ou les proviseurs de 1962 sur les minijupes. Les filles « perturbent ». Alors que si ces messieurs se la taillaient en pointe et se la collaient sur l’oreille, tout le monde serait tranquille, en fait.

👁‍🗨 Mais c’est pas le regard masculin qu’on veut changer. Imagine, un jour, ils se rendent compte que les femmes sont des êtres humains également ? Peut-être que certains d’entre eux briseraient le Grand Cercle de l’Amitié ? Non, c’est pas à eux de changer, c’est à nous de disparaître parce qu’ils ne veulent pas reconnaître qu’ils sont de gros queutards.

Dans les groupes de musique amateurs que j’ai pu connaître, il y a toujours eu la peur de « la meuf qui fait splitter le groupe » ou de celle qui va parler agression sexuelle. J’ai été « meuf de » et au départ, je n’ai pas vraiment été accueillie à bras ouverts, au contraire. Ensuite ils ont compris que ça irait, alors ça a été. Puis mon ex m’a fait de sales coups, je me suis repliée sur moi-même et tout le monde m’a tourné le dos. Tout comme ils ont laissé une « meuf de » presque réussir sa tentative de suicide en l’accusant ensuite de vouloir foutre la merde alors que si les « meufs de » n’avaient pas appelé les pompiers, c’est à ses funérailles que j’aurais été.

Autant rester entre bites. Même si c’est le cœur du problème, c’est LEUR queue du problème.

J’avoue tout. Je n’ai pas envie de rejoindre une bande de potes.

Nan, même pas là. Ils ont l’air très bien ensemble, on va les laisser là.

Quelle « neutralité » attendre de ces personnes ?

On rappelle (oui on est toujours dans la publication mentionnée plus haut, je ne me suis pas perdue) que l’Homme est la Neutralité. Il est le non-énoncé car perpétuel, cela va de soi. La particularité, c’est « les autres ». Les femmes, mais aussi toutes les minorités de genre. L’Homme est la norme, et personne ne va t’embaucher parce que « Vous êtes un homme, ça fera un peu d’air frais dans cette équipe de femmes, surtout si vous faites de la pâtisserie hahaha ». On en a déjà parlé ici et .

Cette domination doit être justifiée. On choisit la biologie parce que c’est le plus simple. Les hommes sont plus grands, plus forts, plus intelligents. D’où ? On sait pas, mais c’est comme ça.

🐦 Dans le contexte des organisations, Collinson et Hearn (1994, p. 12) ont tenté de cerner ces « tensions entre le pouvoir collectif des hommes et des masculinités, et la différenciation entre les hommes et les masculinités ». Néanmoins, ils soutiennent que les diverses masculinités sont centrales à l’exercice du pouvoir genré sur le lieu de travail. Ils proposent cinq discours et pratiques de la masculinité qui sont endémiques dans de nombreuses organisations : l’autoritarisme, le paternalisme, l’entrepreneuriat, l’informalisme et le carriérisme.
L’autoritarisme « célèbre une masculinité brutale et agressive » tandis que le paternalisme « s’appuie sur la métaphore familiale de la « règle du père » qui est autoritaire, bienveillant, autodiscipliné et sage » (1994, p. 13).
L’entrepreneuriat « exprime une approche « dure » et hautement compétitive des affaires et de l’organisation et est associé à des styles de gestion plus récents ».
Le carriérisme suggère une obsession de la réussite hiérarchique, en particulier dans le cas des masculinités de la classe moyenne où les hommes se définissent (et sont définis) « comme des soutiens de famille privatisés dont le but premier est de « subvenir » aux besoins de leur famille » (Collinson et Hearn, 1994, p. 15).
Enfin, l’informalisme révèle la nature du réseautage informel entre les hommes, fondé sur des intérêts et des valeurs masculines partagés.

👉 On est ici dans l’informalisme : cette connivence immédiate et cette solidarité de genre qui repose sur la reproduction de l’exclusion féminine. Les hommes préfèrent travailler entre eux, avec des personnes qui leur ressemblent. On cite ici le recrutement managerial, et je viens de comprendre pourquoi les personnes ayant réussi  à surmonter le harcèlement professionnel dont j’ai pu être victime sont taillées dans la même essence de bois : le directeur est cynique, violent, agressif et sans concession. De mémoire, pas un-e manager n’échappe à cette règle : les deux femmes managers présentent elles aussi ces caractéristiques « masculines » recherchées. Mais si on avait pas un devoir de parité…pas sûre du tout qu’elles auraient eu cette opportunité. C’est les femmes qui sautent en premier quand ça sent le roussi. En tout cas, de leur part, je n’ai jamais reçu aucun soutien, juste de la fausse sympathie pour me soutirer des infos me desservant.

Rémora-style.

Rémora cherchant une nouvelle opportunité professionnelle.

Vannes de vestiaire

🐦 Plus le cercle est fermé, plus il est difficile pour les outsiders de s’introduire et leur difficulté à entrer peut être considérée comme un signe que les insiders ont eu raison de verrouiller la porte car les assaillants sont manifestement incompétents.

[On préfère le] concept de « désir homosocial » qui résume mieux l' »énergie » et la « chimie » qui circulent entre certains hommes au travail et qui peuvent influencer leurs décisions quant à la succession de chacun. C’est une expression qui souligne les « ambiguïtés entre le « social » et le « sexuel » dans les réseaux d’hommes » (Roper, 1996, p. 213).

🔘 On en arrive aux vannes de vestiaires. Tu sais, les vannes de cul trop trop drôle ? Les questions intrusives, l’intérêt pour les menstruations, les avances mal dissimulées, tout ça ? Ben ça sert entre autres à gêner, salir et écarter les femmes des lieux où se déroulent ces exemples attendrissants (non) de l’objectification féminine. Cela permet aussi aux hommes de se raconter des anecdotes croustillantes, mais jamais celles où ils ont eu une panne, non, celles où c’est la femme qui a été en mauvaise posture, si j’ose dire. Et ça les rapproche, de dédain des femmes.

🐦 Les féministes doivent peut-être accepter l’instabilité de la catégorie « femmes », mais cela ne signifie pas que la catégorie ne doit pas être utilisée politiquement (Butler, 1990, p. 15).

🔘 Cette citation est là pour faire plaisir. Merci. On continue.

Une expérience mentionnée et dont, je pense, on peut à peu près toustes se souvenir, c’est le « seul-e au milieu d’un groupe d’hommes ». Moi, seule en salle de réunion ou dans l’ascenseur avec que des mecs, c’est l’angoisse immédiate. Et si on m’oblige de nouveau à faire la bise, je ne réponds plus de rien. Pourquoi je toucherais ta joue, mec ? Ah oui, parce que tu as une position d’autorité et que tu a ignoré mes refus sans doute trop polis. En soirée avec que des mecs ? Je fais plus, ça, sauf si j’ai pas le choix ou que je ne sais pas que je serai la seule meuf. Les vannes, les sous entendus, les « private jokes de dominant » (lol avec le viol), non merci. J’ai vécu trop de moment où ils me posaient tous des questions très intimes en rafale avec la porte beaucoup trop loin de moi.

C’est fait pour. On te rappelle ta condition d’objet sexuel et éventuellement procréatif pour que tu « restes à ta place ». Toi = sexe ou bébé. Compris ?

🐦 [Témoignage] En marge d’une autre conversation, différente, mon nouveau collègue de l’équipe des RH, Carl, vient de me dire qu’il fait partie d’une liste de diffusion réservée aux hommes de l’école de commerce, qui transmet des informations sur le football, des blagues et des discussions sur les investissements financiers. Il n’a pas vraiment dit que les femmes étaient exclues mais nous avons compris que ce devait être le cas lorsque je lui ai demandé qui figurait sur la liste de distribution et qui l’avait invité à s’y joindre. Il était très embarrassé mais ne voulait pas aborder la question de l’exclusivité avec le réseau. En tant que fan de football, j’ai été très surprise et déçue que ce membre du personnel relativement nouveau fasse partie d’un réseau dont je ne connaissais rien (en tant que membre du personnel depuis des décennies). J’ai demandé à toutes mes collègues féminines et aucune d’entre elles n’en avait entendu parler.

🧶 Tu veux ajouter quoi ? Que l’informel est en réalité extrêmement important et se constitue également de beuveries ou de sport entre dudes ? Qu’organiser des « after-work » en semaine exclut d’office toutes les daronnes ? Que l’ambiance de ces soirées est de toutes façons tellement anxiogène que tu retenteras pas, ce qui est le but ?

Selon Google Images, une soirée mecs c’est soit en boîte, soit devant du sport à la télé, le tout avec des bières et des hurlements. J’avoue que ça me tente moyen.

 

Une violence entretenue

🐦 Aujourd’hui, lors de la réunion de notre département, il a fait une présentation sur ses plans pour notre domaine d’activité. Les mots et les phrases qu’il a utilisés pour  » faire du business  » impliquaient généralement une combinaison de  » lignes de front, de fond et de base « , d' » approches à l’épreuve des balles  » et autres commentaires machistes et  » masculinisés « . Il a même applaudi avec enthousiasme le travail du « gourou » des RH, Gary Hamel, qui a récemment exhorté les praticiens des RH à « lutter contre les forces du statu quo », à « saisir les nouvelles opportunités » et à combattre les organisations qui « souffrent d’un faible taux de sperme d’entreprise » (Hamel, 2002, p. 9). Tout cela a été longuement exposé par Simon, avec un visage tout à fait sérieux, et a suscité des regards d’incrédulité sur les visages des femmes universitaires.

📺 C’est vrai que la violence des termes m’a frappée aussi. Tout comme mon désormais ex directeur disait sans ciller « on les a bien violés » en parlant d’un autre service. Grosse ambiance.

Le vocabulaire entrepreneurial est une mine. Perso, quand tu me dis « Big Data » je pense « Big Dick » (désolée, c’est la réalité, mon monde est bien triste, je sais).
« Bootcamp » désignera donc des formations aussi intensives que 2 semaines au camp militaire (c’est un terme militaire à la base, oui)
Que dire du terme « Mompreneur » (maman-entrepreneur) ? Je te laisse y réfléchir.

On loue l’agressivité, l’insistance, on mise tout sur un développement rapide (growth hacking, lean management). J’insiste sur l’agressivité et la violence qui sont encouragées plus ou moins directement. Loup de Wall Street style, tu vois ? Si la violence et le mensonge peuvent apporter beaucoup d’argent, alors…on va continuer à encourager ces « qualités », tout en déportant le SAV sur les femmes. Tu me crois pas ? Combien de mails j’ai dû faire pour mes divers responsables…combien de client-es j’ai calmé-es pacifiquement au téléphone ? « Une vois féminine ça passe mieux » « Tu peux gérer machin ? Il est chiant je veux pas lui parler ». Genre moi j’ai qu’une envie c’est de rattraper tes merdes.

Et on s’étonne que le capitalisme soit violent. Et on s’étonne que beaucoup d’hommes soient violents alors qu’ils suivent les règles du jeu. Le système s’auto-entretient, strate après strate, génération de connards après génération de connards. Est-ce la violence masculine qui nourrit le capitalisme ou le capitalisme qui nourrit la violence masculine ? J’en sais foutre rien.

😭 Puis tu as Guillaume, un jeune collègue, à qui tout le monde demandait « C’est pas trop dur de ne travailler qu’avec des femmes ? ». Il était clairement déclassé, cette question ne lui était pas posée avec bienveillance. J’ai eu d’autres collègues « touts seuls » pour qui c’était la même. Et un collègue qui se vantait d’avoir rendu un service entièrement masculin, haha, qu’est-ce qu’on se marre dis donc.

Les instituteurs, les maïeuticiens, les infirmiers, les assistants maternels, tous soupçonnés de nourrir des penchants pédophiles, sinon, pourquoi choisir ces métiers-là ? C’est obligatoirement pour une paye de ouf ou de la gratification sexuelle, non ? Et comme t’as pas une paye de ouf…rien d’autre ne peut justifier ton orientation professionnelle.

Seule configuration possible lorsqu’on parle de « mec dans un groupe de femmes »

D’un autre côté, c’est bien utile, car ça permet aux comploteuses de se dissimuler habilement sous couvert de « club de tricot » ou de macramé.

Le women’s club c’est les interstices de liberté…

 

Partie 2 : Homosocialité

🐦 « En sociologie, l’homosocialité décrit les relations fréquentes et régulières entre membres du même sexe qui ne sont pas d’une nature romantique ou sexuelle, telles que l’amitié ou le mentorat. Par définition, elle ne suppose ni l’hétérosexualité ni l’homosexualité et se distingue de l’homoaffectivité (affections fortes entre personnes de même sexe), l’homosensualité (relations sensuelles entre personnes de même sexe mais sans érotisme, comme entre père et fils, mère et fille, camarades militaires ou entre sportifs) et l’homoérotisme (relations érotiques entre personnes de même sexe). Le contraire de l’homosocialité est l’hétérosocialité, où on préfère des relations non sexuelles avec l’autre sexe. L’homosocialité a été vulgarisée par la discussion d’Eve Sedgwick sur le désir homosocial masculin, alors qu’elle avait été définie avant par Jean Lipman-Blumen (en) comme une préférence sociale (et non sexuelle) pour les membres de son propre sexe. »
(Wikipedia)

Dans la partie précédente, on disait que les hommes évitaient en général les lieux où il n’y a pas d’autre homme pour entretenir cette homosociabilité, et on disait que le capitalisme s’appuyait sur la masculinité pour performer en encourageant les comportements agressifs et violents.

On va continuer là dessus.

Les « mecs tout seuls dans une bande de meufs », y’en a pas des masses car il est manifestement malaisant pour les hommes, les vrais, tu sais (sarcasme) de copiner avec des femmes. On prête souvent des intentions cachées (le sexe) aux mecs qui fréquentent des femmes. Si il est à sa place ici, alors c’est qu’il doit en tirer un bénéfice. Que ce bénéfice se situe au niveau de la performativité toxique de la masculinité n’effleure personne. C’est impossible d’avoir des amies femmes si c’est pas pour niquer.

Mieux, il arrive qu’une équipe ait « trop de femmes » et qu’on dise « on a enfin recruté un homme, ça va faire du bien ! »
Rigole pas, ça m’est déjà arrivé 3 fois dans ma carrière d’entendre ce genre de connerie. Mais « trop de femmes, ça dévalorise la profession », alors bon…

On décourage ainsi l’accès aux métiers perçus comme « féminins » : assistante sociale, infirmière, sage-femme, nounou. Si l’homme veut un accès à des enfants ou à des personnes en difficulté, c’est forcément pour en tirer une gratification sexuelle. Personne n’envisage la possibilité d’une vocation, non.

Instant honnêteté coupable : Si j’aurais confié mon fils à un homme ? Absolument pas. Parce que moi aussi j’ai grandi avec cette idée et que je sais que l’agresseur est souvent un proche. J’ai été victime, je n’ai plus confiance du tout et j’y peux pas grand chose. Mais le problème est vite résolu : il n’y a pas d’homme assistant maternel dans ma zone et l’Enfant n’en a plus besoin.
N’empêche.

Prendre tout l’espace

🐦 « Vous avez vu comment la conversation a été prise d’assaut ? Il était évident que dès leur arrivée, nous allions devoir écouter leur dernière success story, leur appréciation et leur branlette mutuelle. »

🧲 Ils prennent l’espace, idéalement tout l’espace, et réussissent à attirer l’attention vers eux, quoi qu’il arrive. On doit savoir qu’ils ont la possibilité de débouler à tout moment pour nous interrompre. J’ai beaucoup constaté ça en entreprise. On laisse parler à torrents les mecs (plus t’es gradé, plus tu jactes) et on raccourcit le temps de parole des femmes en les interrompant, en posant des questions à la con ou en faisant des allusions grivoises ou relatives à la présumée incompétence de celle qui parle. J’ai vu ça vraiment, vraiiiiiiiment souvent. Comme je suis une blagueuse moi aussi, j’ai tenté de faire des vannes, et on m’a reproché mon manque de professionnalisme et ma familiarité. On peut donc faire des remarques sur ma tenue ou mes tatouages apparents pendant que je fais une présentation et la situation n’est pas symétrique.

Non, je ne peux pas vanner mon collègue chauve car il est chauve (je ne fais pas ce genre de « vanne » tkt), mais on peut me faire remarquer que mon sweat-shirt Rick et Morty est trop bizarre en faisant semblant d’être ébloui par ce jaune vif plusieurs fois dans la journée, ça n’est ni familier, ni déplacé. Je n’ai plus remis ce sweat et je vais le ressortir du placard dans lequel je l’avais caché, tiens.

Il est sublime, pourtant !

Une femme ne peut pas être cheffe !

🐦 « Lorsqu’il est apparu que j’allais postuler pour le poste de chef de département, un collègue masculin m’a dit : « Ma seule objection est que je vais avoir une femme comme manager ! »

☣ On dirait presque qu’il faut s’échapper ou se prémunir d’un venin extrêmement toxique qui tue toute forme de vie autour de lui.

Pourquoi cette panique avec l’augmentation du ratio femmes/hommes ? Peur du déclassement ? Peur d’un entre-soi compromis par toutes ces hormones ? Peur qu’une femme « perturbe » en existant ? Peur que les blagues sexistes et récits d’exploits sexuels ne soient plus tolérés ?
Ouin ouin ?

💋 L’avantage à être « entre couilles » (on dit « entre ovaires, nous ??! ») c’est que tout le monde a le même objectif secondaire : maintenir la domination masculine, plus ou moins consciemment, plus ou moins cyniquement. Un mec tout seul ne va pas se dire « Merde, et les femmes ? », parce qu’il n’y pense pas. L’esprit du privilège est là, il est normal, car le sujet en bénéficie depuis sa naissance. L’homme en question ne va pas se dire de lui-même que le patriarcat est toxique, car le patriarcat lui profite, c’est une question qu’il ne doit surtout pas se poser. Mais ça, il peut plus trop le dire, donc il dit « J’y avais pas pensé » et n’y pense pas. Pour que la question prenne corps, il faut un début de commencement de volonté, et de volonté de perte des privilèges. Pas gagné, quoi.

C’est comme si, tous les jours, j’avais un billet de 20€ dans ma boîte aux lettres. J’ai aucun intérêt ni à ce qu’on s’en rende compte, ni à ce que ça s’arrête. Donc « j’y ai pas pensé oups 20 balles quelle chance dis donc hahaha ». Du déni, de l’hypocrisie, du cloisonnement et le tour est joué.

Et, pour aider, on trouve des raisons « valables » à l’embauche de femmes : obligation de parité, décision de la direction, salaires moins élevés, postes moins prestigieux. Si on embauche une femme, c’est suuuurtout pas pour ses compétences, c’est parce qu’elle apporte autre chose. Des cookies faits maison, de la douceur, de l’écoute bienveillante, de la solidarité et une moindre agressivité dans l’équipe. Ça te semble idiot ? Dis toi que j’ai été embauchée à un poste de cadre uniquement pour ces raisons. Mon CV tenait la route, mais on a admiré mes capacités à communiquer et à mettre les gens à l’aise. J’aurais pu avoir juste un BTS en Infographie, ça serait passé, ils avaient 30 personnes sur 3 services, 30 mecs. J’ai vécu des moments délicieux (non).

🐦 « Si un homme nomme une femme, c’est parce que celle-ci lui plaît ; si une femme nomme un homme, c’est peut-être parce qu’il lui plaît ou qu’il est le meilleur pour le poste ; si un homme nomme un homme, c’est parce qu’il est le meilleur pour le poste (et non parce qu’il nomme à sa propre image) et finalement, si une femme nomme une femme, elle favorise probablement les femmes parce qu’elle est une femme elle-même. »

🤔 Pile je gagne, face, tu perds.

Un pouvoir bien gardé hors de la diversité

🐦 « L’accent mis sur les femmes en tant que « problème » a détourné l’attention du lien intime entre les discours sur la masculinité, la rationalité et le leadership. Les hommes blancs, hétérosexuels et de classe moyenne continuent à exercer un pouvoir culturel et financier dérivé des discours éducatifs actuels sur le « bon » leadership – des discours qui associent la masculinité à la rationalité économique, à la force, à la prise de décisions « difficiles » et à l’esprit d’entreprise (Blackmore, 1999). La notion de l' »homme rationnel » organisationnel reste extrêmement puissante et, malgré des exemples contraires, certains hommes de cette étude ont continué à se distancier discursivement de toute notion de comportement émotionnel masculin. »

🔸 Les femmes sont peut-être irrationnelles, mais elles ne constituent pas 90% des effectifs pénitentiaires. Objectivement, il n’existe aucune raison de penser qu’une femme est moins rationnelle. Je suis sûre et certaine que si ça avait été démontré…je vais chercher. Et trouver un truc qui en parle et qui pondère que non, les femmes ne font pas forcément baisser la productivité des entreprises.

🐦 « Pour reprendre l’argumentation de Rosabeth Kanter [1977], il faut qu’un groupe social atteigne une taille critique pour réellement influencer le fonctionnement d’une organisation, changer la nature des interactions et modifier la dynamique de groupe. Dans son article, l’auteure estime à 35 % la taille minimale que doit avoir une minorité pour réellement influencer le comportement du groupe dominant. C’est pour cette raison, qu’analyser l’impact de la diversité dans les entreprises à partir de la féminisation (souvent anecdotique) des comités de direction peut difficilement aboutir à des résultats significatifs  »
(Les femmes influencent-elles la performance des entreprises ? – Michel Ferrary sur Cairn – 2010)

🔸 Par contre, elles font des bébés, et ça, ça fait chier.

🐦 « Sur la période 2002-2006, les quatorze entreprises qui ont plus de 35 % de femmes dans leur encadrement, ont connu en moyenne une croissance de 23,5 % de leur chiffre d’affaires. Les vingt-huit entreprises qui ont moins de 35 % de femmes dans leur encadrement ont connu une hausse de leur chiffre d’affaires limitée à 14,6 %. La différence de performance entre les deux groupes est de 61,1 %. En ce qui concerne la rentabilité (somme des résultats opérationnels sur 5 ans/somme du chiffre d’affaires sur 5 ans), on peut noter que les quatorze entreprises à l’encadrement féminisé ont connu en moyenne une rentabilité de 19,5 % et les vingt-huit autres n’ont eu en moyenne qu’une rentabilité de 10 %. La différence de performance entre les deux groupes est de 96,1 %. En matière de productivité du travail (moyenne sur cinq ans de la productivité annuelle des salariés), les quatorze entreprises à l’encadrement féminisé ont eu une productivité du travail supérieure de 33,9 % à celle des vingt-huit entreprises dont l’encadrement est féminisé à moins de 35 %. En matière de création d’emplois, les quatorze entreprises à l’encadrement féminisé ont connu en moyenne une augmentation de 18,9 % de leur nombre d’emplois et les vingt-huit autres n’ont connu qu’une augmentation de 7,4 % de leur nombre d’emplois, soit une différence de 156,5 %. En revanche, en ce qui concerne l’évolution du cours de bourse, les quatorze entreprises à l’encadrement féminisé, n’ont connu qu’une hausse de 42,1 % de la valeur de leurs actions, contre 64,3 % pour les vingt-huit autres ; soit une différence de performance de -34,5 % »
(Les femmes influencent-elles la performance des entreprises ? – Michel Ferrary sur Cairn – 2010)

 

Part des femmes dans l’encadrement (étude ci-dessus)

 

Part des femmes dans l’effectif total

35%, hein. On est à ça !

L’auteur qui cause plus haut parle de l’implication personnelle dans l’organisation. Et, effectivement, si je me fais envoyer chier constamment, je vais me replier sur moi-même et éventuellement démissionner. Comme j’ai pas fait ça, on m’a juste collée au placard pour invoquer Jeff the Killer en attendant que je me calme.

💀 Ce fut efficace.

Handicaps féminins

Les femmes font non seulement des bébés, mais doivent ensuite s’en occuper (les enfants sont souvent conçus par parthénogenèse), genre aller les chercher à l’école, s’organiser pour les vacances scolaires et tout ça. Donc on va coller toutes les réunions après 17h30, tu vois ? C’est astucieux, j’avoue. On exclut de fait (et je n’ai jamais réussi à faire changer l’heure de ces réunions) les femmes avec une vie personnelle et familiale.

🧱 On nous trouve moins fiables, plus absentes. Comme beaucoup de daronnes n’ont pas l’énergie de se murger les soirs de semaines, adieu les afterwork ! Elles ont moins d’argent, adieu les restos le midi ! Est-ce qu’on organise volontairement des afterwork en semaine ? J’en sais foutre rien, mais ça arrive assez souvent. Et le lendemain, toi tu es fraîche comme une petite fleur de printemps et tu les vois arriver à 10h, la gueule enfarinée, à se taper dans le dos en matant les photos de la soirée. 10h ? 10h, mais tu étais avec ton directeur, qui lui aussi est rentré tard. Alors ça va le faire. Et ça le fait. Ta collègue qui arrive habituellement tard, elle, se fera licencier (j’ai pas eu le direct du licenciement mais ça a été assez saignant).

Sauf qu’une daronne, justement, elle a une vie. Elle a d’autres choses à penser que l’amour de son entreprise. Donc elle arrive, elle BOSSE EN CAPSLOCK. C’est mon propre vécu, celui de potes, ça n’a rien de scientifiquement prouvé, mais je ne connais pas plus dure au boulot qu’une mère de famille qui doit ABSOLUMENT décoller à 17h pour aller chercher son ou ses enfant(s).

😎 Une daronne, elle sait gérer plusieurs choses à la fois et transcender l’épuisement. Encore une fois, je me base sur mon cas + les potes. Mais après avoir été enceinte, après avoir accouché, après avoir survécu aux 6 premiers mois, la fatigue, c’est pas si grave. Je pensais avoir connu la fatigue, j’ai eu des phases hypersomniaques en début de traitement (16/18h de dodo par jour), mais je me plantais. Je ne connaissais PAS la fatigue. Je ne connaissais pas non plus cette force invisible qui te tire d’un sommeil profond à 3h du mat alors que ton enfant ne va pleurer que dans 10 secondes.

Je suis désormais apte au non-sommeil prolongé. Je peux bosser comme une ouf dès 3h du mat s’il le faut. Je dépasse mes limites, constamment, sur tous les points.

Mais je suis aussi une cible facile : on peut m’exclure juste avec les horaires de réunion et les afterwork.

En tant que travailleuse, depuis que je suis maman, j’admire énormément les femmes qui travaillent en étant mères (et les mères en général). C’est hyper sous-estimé, mais la CHARGE qu’on prend est inimaginable, et on tient le coup. Quand je vois l’état d’épuisement dans lequel j’arrivais le matin après une nuit blanche de gastro de nourrisson, quand je vois ce que je réalisais (mon boulot, en entier), je me dis que vraiment, les mecs qui embauchent ont complètement sous-estimé notre capacité à travailler.

Les femmes, moins efficaces ?

Et, en tant qu’amie, je vois des potes complètement surmenées avoir des journées ministérielle et sans fin, de la routine du matin au tunnel du soir. Et on le fait. On a pas le choix. L’Enfant dépend de nous. C’est surhumain.

Les femmes sans enfant sont également plus performantes. Elles doivent PROUVER sans cesse leur valeur, elles se battent comme des lionnes et ne se reposent pas sur leurs acquis. J’aime beaucoup travailler avec des femmes. Ce n’était pas le cas avant, car j’ai des attributs dits « masculins » (grande gueule, impulsivité, agressivité éventuelle, tenacité, fermeté sur mes demandes) et je passe bien dans les groupes de mecs. J’ai souvent appris après coup que j’étais un enjeu sexuel, bon. Mais j’ai cédé ces attributs virils contre une bienveillance à toute épreuve. Je reste impulsive, mais j’ai compris, grâce au féminisme, que me comporter en rémora ne servait qu’à valoriser les mecs. J’ai appris à apprécier mes collègues féminines en remettant justement mes propres idées en question.

Evidemment, il y a des contre exemples. J’ai eu des collègues complètement à la ramasse, mais c’est pas si fréquent. On a une obligation de performance, on est surveillées pour être sanctionnées à la moindre erreur, on doit déjouer des pièges grossiers, les femmes compétentes avec lesquelles j’ai pu travailler étaient souvent bien plus que compétentes. Je me souviens de la directrice d’un site sur lequel je travaillais, une ingénieure partie de nulle part, qui s’est battue toute sa vie comme une reine, qui a su s’imposer et qui a obtenu de très bons résultats. Je veux que ce soit elle, mon modèle, pas le directeur libidineux qui m’a un jour posé la main sur l’épaule (il l’a regretté).

J’ai d’ailleurs été victime de harcèlement sexuel, à plusieurs reprises. C’est aussi une manière « à la française » (le troussage de domestique, tsé) d’asseoir une domination et de générer de la peur chez les femmes en contact avec le Puant. Pas de bol, je suis survivante de tellement de saloperies que mon regard suffit à montrer que si tu vires pas ta main de mon épaule, je vais t’en coller une. Je dis ça, sur un poste c’était tellement craignos qu’un collègue surveillait son propre collègue pour qu’il ne vienne pas me voir tôt le matin quand j’étais seule dans le bureau…

Le harcèlement, sous toutes ses formes, sert à maintenir les femmes et les personnes en minorité de genre ou de couleurs en position de faiblesse et d’impuissance.

"Photograph.

L’affection virile est la seule acceptable

Quand aux hommes entre eux…c’est une autre histoire plutôt romantique ❤️

🐦 « Ces manifestations publiques d’intimité peuvent être physiques (poignées de main, tapes dans le dos, bras tendus), verbales ( salut mon gars, blagues et humour, voire insultes) et/ou spécifiques à un sujet (sport, bricolage, voitures, voire badinage sexuel ou « crumpet » pour citer un collègue masculin). Ils déchargent une membrane invisible de proximité entre les hommes impliqués individuellement et qui exclut tous les étrangers (principalement les femmes et très occasionnellement quelques hommes dissidents). Ces hommes aiment vraiment être ensemble, se sentent plus à l’aise lorsqu’ils sont entourés d’autres hommes et mal à l’aise lorsqu’il y a trop de femmes universitaires !

[…]Les liens entre ces hommes dégagent une chimie intime et émotionnelle. Il peut s’agir d’humour ou d’insultes, de tapes dans le dos ou de poignées de main, mais c’est une manifestation publique de séduction et d’appartenance (Kaplan, 2005). Cela ébranle le mythe de l’homme d’organisation non émotionnel (Roper, 1996). Cet aspect était particulièrement évident lors de l’observation des conversations de couloir et des moments informels pendant les événements critiques. Le toucher physique, le souvenir excité de moments sportifs ou de beuveries, les salutations chaleureuses, face à face, main dans la main, qui incluent les initiés du groupe et excluent tous les autres. Invisible : bien que souvent manifestées dans les espaces publics, l’identification des performances masculines comme étant le fait d’hommes ou comme étant masculines n’est souvent pas verbalisée, ni par les hommes ni par les femmes. »

🥰 Leur affection va de soi, leurs conversations ne sont pas « des commérages », leurs rendez-vous non-mixtes sont parfaitement sains. Ils se perçoivent les uns les autres comme plus compétents et s’encouragent donc, se cooptent entre eux. Le tout en se défendant mollement d’une quelconque intentionnalité, car le deal n’est pas formalisé tel quel. Ils se voient entre mecs, c’est tout, ça ne va pas plus loin, pour eux. Le réseautage ? Du boulot. L’exclusion des femmes ? Elles n’ont qu’à participer et s’incruster, si elles ne le font pas, c’est qu’elles ne le souhaitent pas, et pas du tout parce qu’une soirée « entre couilles » est pas forcément une perspective réjouissante.

Un afterwork c’est sensé ressembler à ça. Note la présence écrasante de femmes.

Injonctions contradictoires

« Prends le lead » m’a dit mon directeur. Alors je l’ai fait. J’ai géré des problèmes chiants qui traînaient depuis des années, et on m’a convoqué pour me dire « prends moins le lead stp ». Chacune de mes décisions impactait mon propre responsable, à qui on faisait les remontées, pas à moi, même si j’étais clairement identifiée dans les échanges. On a fini par me demander d’arrêter de prendre des décisions qui fâchent, parce qu’on allait laisser le statu quo et les chaînes de décisions bien au chaud depuis 20 ans.

Pour ensuite prendre les mêmes décisions, évidemment. En moins gentiment formulé, par pure autorité. Pour se venger, on m’a fait refaire un site dont j’avais demandé la suppression. Je l’ai fait. 24h après on me demande de détruire ce site (ce qui était ma demande initiale, le truc était obsolète et pouvait porter préjudice à l’entreprise). Tout ça pour dire « qui c’est le chef ? ».

Claquage de beignet suite à informations contradictoires, ma décision première, mes efforts pendant 2 ans pour obtenir l’aval des protagonistes, tout ça a juste été balayé après m’avoir soutiré 2 jours de boulot pour rien.

🤢 Le directeur libidineux qui raconte ses soirées libertines dans le détail et harcèle suffisamment une femme pour qu’elle démissionne est toujours en poste, lui.

Le directeur qui use de violence verbale soutenue et dit « on les a bien violés » est toujours en poste. Ce sont ses employé-es qui sont parti-es.

Ce que je veux dire en racontant ma vie, c’est surtout que les techniques de fourbasse sont multiples, pour protéger les copains. Le truc est rampant et multiforme, les techniques nombreuses et l’asservissement plutôt facile, finalement. Tout pour préserver le boy’s club, les ententes invisibles, les courtes-échelles pour monter en grade, les choix managériaux, les rendez-vous « entre couilles », et surtout, l’exclusion des rares femmes qui parviennent à leur stade.

Les femmes présentent une menace : elles font des bébés, et puis elles sont soupçonnées d’incompétence, elles ne peuvent pas s’investir autant car elles ont une vie. Perso, je trouve ça pas mal d’avoir une vie en dehors du boulot. Mais le capitalisme sait que les hommes sont plus faciles à pressuriser jusqu’à la mort pour servir le système. Un homme peut échapper à son devoir de père, par exemple, on va juste dire qu’il travaille beaucoup. Une femme attachée à sa carrière, elle, sera une mauvaise mère. La rengaine, quoi.

Une admiration sans faille

Ainsi, on se retrouve avec des hommes qui entretiennent des relations affectives tout en s’en défendant. C’est pourtant la nature de ces relations : une intimité, une connivence, la confiance, le respect et parfois l’admiration. Les mentors sont rarement des femmes. Lors des discours de remerciements, ce sont des hommes qu’on cite le plus souvent.

Ils aiment les sportifs, les politiques, leurs collègues, leurs chiens, mais n’admettront jamais qu’une femme les a soutenus, inspirés, aimés. Parce que ça, c’est trahir. On admire le travail des hommes et c’est assez facile vu le peu de femmes dans certains milieux. On les admire, on les aime d’un amour bien différent de l’amour romantique ou physique, mais d’un amour indéfectible. Une femme trahit, après tout, non ? On est connues pour ça.

« On dit que derrière chaque grand homme se cache une femme »
Ou comment normaliser le travail invisible des femmes.

Partie 3 : aimer les femmes

TW : mention relatives à des pratiques sexuelles, sans description.

Attention : certains propos sont ici généralisés. Donc si tu viens dire « les femmes aussi » ou « pas tous les hommes » arrête ta lecture ici et mange un croissant, ça te fera du bien.

Que dire. Que dire. Je me traîne, on est lundi, c’est les vacances scolaires.

On va continuer sur le désir homosocial avec cette question :

💔 Nous aiment-ils au moins un peu ? 💔

Amour, définition :

💓 Sentiment vif qui pousse à aimer (qqn), à vouloir du bien, à aider en s’identifiant plus ou moins. ➙ aimer ; affection. L’amour et l’amitié. L’amour du prochain. ➙ altruisme, philanthropie.
💓 Ce sentiment, considéré comme naturel entre les membres d’une même famille. L’amour maternel, paternel ; filial.
💓Inclination envers une personne, le plus souvent à caractère passionnel, fondée sur l’instinct sexuel, mais entraînant des comportements variés. Un mariage d’amour.
💓 Faire l’amour : avoir des relations sexuelles.
💓 Personne aimée. Mon amour.
💓 Personnification mythologique de l’amour. Peindre des Amours.
💓 Attachement désintéressé et profond à une valeur. L’amour de la vérité.
💓Faire une chose avec amour, avec le soin, le souci de perfection de qui aime ce qu’il fait.
💓Goût très vif pour qqch. qui procure du plaisir. L’amour de la nature.

Comme tu vois, c’est pas à sens unique, dans tous les sens du terme. Il y a pléthore de formes d’amour.

Donc oui, si on se base sur la définition liée au relationnage sexuel, ils nous aiment. C’est d’ailleurs un grand thème de la chanson française :

Femmes je vous aime de Julien Clerc

Quelquefois si douces
Quand la vie me touche
Comme nous tous
Alors si douces
Quelquefois si dures
Que chaque blessure
Longtemps me dure
Longtemps me dure
Femmes
Je vous aime
Femmes
Je vous aime
Je n’en connais pas de faciles
Je n’en connais que de fragiles
Et difficiles
Oui, difficiles
Quelquefois si drôles
Sur un coin d’épaule
Oh oui, si drôles
Regard qui frôle
Quelquefois si seules
Parfois elles le veulent
Oui mais si seules
Oui mais si seules
FemmesJe vous aimeFemmesJe vous aimeVous êtes ma mère, je vous ressembleEt tout ensemble mon enfantMon impatienceEt ma souffrance
FemmesJe vous aimeFemmesJe vous aimeSi parfois ces mots se déchirentC’est que je n’ose pas vous direJe vous désireOu même pireÔ Femmes

Je te rassure, je fais que celle-là, mes yeux commencent à saigner. Je te rassure, je ne vais pas analyser et clasher les paroles même si j’en ai effroyablement envie. Tu as échappé à Brassens, c’est déjà pas mal.

Ce que je vais faire, en revanche, c’est souligner les caractéristiques cet amour masculin envers les femmes. Julien Clerc aime les femmes, mais pourquoi ?

👉 Les femmes sont douces et prennent soin des hommes.
👉 Mais des fois on fait mal, succubes que nous sommes.
👉 Les femmes sont compliquées et fragiles.
👉 Les femmes maîtrisent parfois les arcanes subtiles de l’humour et de l’intellectualisme.
👉 Les femmes célibataires se sentent seules, à chaque pot son couvercle.
👉 Mention de la mère, forcément.
👉 Il ose pas dire qu’il a envie de niquer.
👉 « Ou même pire ».

En gros, il liste toutes ces CONSTATATIONS (pardon j’avais prévenu j’utilise plus le mot constat pour emmerder le monde) pour finir par le seul truc qui ouvre une porte : le cul. Il passe sur des qualités utilitaires (le soin, l’affection, parfois l’humour mais faut pas abuser, la douceur, les gâteaux, la maman). C’est ce qu’il n’ose pas dire, c’est la conclusion de la chanson, l’exemple est époustouflant, on remercie mon ancien responsable qui me l’a collé un 8 mars dans le bureau et qui a failli finir en kebab.

L’amour masculin envers les femmes est relativement pauvre

Du cul, du care, le ménage, les gosses. Si en plus elle est pas trop conne, c’est bingo. Mais faut pas qu’elle soit plus intelligente ou qu’elle gagne plus d’argent ou qu’elle ait un statut plus prestigieux, sinon ça les intimide. Dans ce cas, ils décrètent qu’elle est sans doute lesbienne (quand tu dépasses le stade de « chercher à plaire aux mecs » tu deviens lesbienne, c’est automatique, si tu n’y as pas encore pensé, envoie un MP, je transmettrai ta demande au Comité, ça te donne droit à une entrée gratos pour aller voir Hannah Gadsby.)

Mais on est pas vraiment dans l’amour, ici, on est dans le désir. Le désir est construit, élaboré, il peut rester sous cette forme aussi longtemps que nécessaire. On aime et on veut, on admire et on veut, on est au delà de l’amour, on est dans le levier de l’amour : on aime, et on VEUT.

Les bandes de potes font plein de trucs ensemble. Picoler, déjà. L’activité sociale n°1 avant le sport et les jeux de foot sur Playstation. Oui je grossis le trait, évidemment, je grossis le trait, parfois ils ont des groupes de musiques ou comme seul objectif de faire des conneries dangereuses ensemble.

La présence d’une meuf peut être vue comme « casse ambiance » et autres « les filles cay nul ». D’où les clubs masculins non-mixtes où on peut entretenir ses amitiés viriles en toute discrétion.

Faut pas, faut pas que je cherche des images en buvant du café, mon clavier a eu chaud.
RELEASE THE BEAST !!!
Me demande pas de commenter la posture du mec, j’ai envie de finir ce billet.

👻👻👻

Car il y a UNE chose qui fait peur à ces messieurs.

Cette chose, c’est l’homosexualité.

« Gay ! » est une insulte qu’ils se lancent parfois. Être gay, c’est être un cran en dessous sur l‘échelle des valeurs de la réalité capitalistique c’est pas nous qu’on fait les règles.

Tu peux avoir des potes avec qui tu partages toute ta vie, mais ça veut pas dire que t’es gay, OKER ? Rien à voir. Il faut absolument garder le secret sur nos échanges tout en ne paraissant pas homosexuels. Pour aider, on a créé le terme de « bromance » : la romance entre deux bros (potes). Romance absooooolument désexualisée, bien sûr. On a pas inventé un mot pour retomber dans le même piège. Non. Nous on est amis et on veut que le monde sache qu’on ne couche pas ensemble.

Ou…pas ? 😁

Le désir homosocial est-il sexuel ?

J’ai déjà lu plusieurs récits où des hommes se livrent à des activités sexuelles ensemble (mater un porno en se tripotant mutuellement) mais non non, on est absolument 100% hétérosexuels.

Quora me propose un de ces questionnement (trad de l’anglais) :

Suis-je gay si je touche la bite d’un ami ?

🤔

« S’il n’y a pas de mauvaise intention, qu’il s’agit d’un ami proche et qu’il le fait en plaisantant, alors vous n’êtes pas gay. Parfois, des amis proches le font pour se taquiner, sans que cela ait une connotation sexuelle. Quand j’étais jeune, des personnes plus âgées faisaient un geste de la main, soufflaient dans leur poing et me touchaient l’entrejambe, et ils en riaient. Il n’y a pas de malice mais juste de la taquinerie. Une fois, un ami m’a aidé à me raser l’entrejambe, mais aucune tension sexuelle n’a été ressentie. Je suppose que j’ai grandi à une époque différente où l’inhibition du corps n’est pas un tabou. »

🤔

« Si je suis hétéro mais que j’aime bien prendre mon pote parce que c’est bon, est-ce que c’est considéré comme gay ?

🤔 …heu…oui… ?

c’est comme tu veux le nommer. Les hommes sont excités, c’est aussi simple que ça. Ils veulent jouir. Le sexe MM est facile à obtenir, alors profitez-en.

Non, c’est juste sexuel, enjoy.

Je pourrais continuer longtemps, j’en ai plein sous les yeux. TOUT pour ne pas être gay ou bi. Sache donc qu’un mec peut se taper son pote régulièrement, en toute amitié virile hétérosexuelle. Les potes le rassurent dans les réponses : non, ça va, c’est pas gay. Je ne sais pas comment exprimer le fait que faire l’amour avec des hommes lorsqu’on est soi-même un homme, ça s’apparente un tout petit peu à de l’homosexualité et qu’en fait, on se détend, c’est pas grave d’aimer les hommes, tu fais ce que tu veux de ton corps.

Absentes mais indispensables

Ce qui me renvoie à la question : aiment-ils réellement les femmes ou sont-elles une étape obligatoire de la vie d’un homme (les bébés) ?

On peut aller côté PUA pour voir ça, et avec un lien qu’une âme bienveillante m’a fait parvenir et qui m’a indirectement aidée. Une page Facebook entre toutes « La Voie de l’Homme » où le coach en séduction promet qu’on va relationner comme des ouf avec son ebook gratuit.

Et il a un groupe aussi :

Ce groupe est le groupe #1 destiné aux hommes que l’on dit « trop gentils », « trop sensibles » pour attirer et plaire aux femmes, et à ceux qui sont constamment bloqués dans la « friendzone ».
Mais aussi de ceux qui se sont concentrés sur être des personnes plus accomplies, et qui ne veulent pas jouer à des petits jeux pour plaire et attirer des relations stimulantes.
[…]
__________________________________________
✅ A QUI S’ADRESSE CE GROUPE ? 🔥
__________________________________________
Ce groupe est un espace pour t’aider à te transformer en tant qu’homme, développer ton pouvoir d’attraction et attirer à toi l’amour tout en étant capable de construire une vraie relation saine, stable et durable. 🚀💝
SANS négliger ta carrière et tes accomplissements.
SI TU VEUX :
– devenir attirant sans changer qui tu es (c’est à dire sans devenir un “bad boy”, un gros beauf, un macho, un type arrogant ou un « homme Alpha » déconnecté de ses émotions et dominant qui ne respecte pas les femmes) 🧲
– dégager plus de confiance
– améliorer ton image de toi-même
– exprimer plus facilement tes émotions
– être à l’aise avec ta masculinité
– séduire sans avoir à aborder
Mais SURTOUT : ATTIRER des relations épanouissantes, puissantes, agréables sans jouer à des petits jeux inutiles.
POUR :
– Attirer l’amour
– Créer la relation à laquelle tu aspires au fond de toi
– Transformer ta vie sentimentale et intime
ALORS :
– Ce Groupe Est Pour Toi

Un groupe d’hommes non-mixte qui ne le dit pas (mais je doute pouvoir entrer dans le groupe) qui donne des conseils à d’autres hommes en détresse. Et là, ça m’a frappée. BIM (merci Ronan, je t’envoie la facture). En quoi des mecs seraient-ils plus adaptés pour parler drague que des meufs ? Comment savoir « ce que veulent les femmes » sans les premières intéressées ?

Ben en fait, on s’en fout, de ce qu’elles veulent. Si on en croit ma bien trop vaste connaissance des PUA, il s’agit simplement de manipulation basée sur l’insécurité affective des femmes (encore elle) dans le but de niquer. On cherche pas à savoir ce qu’elles veulent, d’où le mythe du bad boy qui pécho tout le monde, on cherche les leviers par l’intermédiaire desquels on va la ramener à la maison. Le plaisir de la chasse, si tu veux.

Un film d’une qualité époustouflante. Que j’ai vu deux fois. Pose pas de question.

💐 Ce que veulent les femmes 💐

Étant donné qu’ils ne se basent que sur leur propre expérience, le désir féminin leur apparaît vraiment trop chiant à essayer de comprendre, on devient donc « compliquées » cf. la Chèvre qui fredonne plus haut qu’il aime les femmes.

Donc les femmes aiment :
🌸 Les bad boys alpha qui vont leur faire du mal
🌸 L’argent, les cadeaux
🌸 Prendre soin de leur apparence
🌸 Qu’on leur montre qui est le plus fort comme si on était dresseur canin.

Est-ce une vision réaliste du désir des femmes ? Absolument fucking pas. Nope. Tu sais pourquoi, moi, je me méfie des mecs qui me portent de l’attention ? Parce que je sais que deux fois sur trois, l’intérêt est sexuel. Les nice guy, je m’en méfie comme la peste, oui, pourquoi ? Parce que trop souvent c’est juste une manipulation de plus pour niquer. Je connais des mecs vraiment gentils, j’en ai épousé un. Mais on perçoit la manipulation avec le temps et l’expérience. Combien de « nice guys » se révèlent tout aussi toxiques que les autres ? Combien de « nice guy » vont faire porter l’ensemble de la charge affective sur leur partenaire ? Dire « Je suis nul » est souvent une demande d’infirmation par l’intéressée. « Mais non, t’es pas nul ». Est-ce notre boulot que de consoler les égos ? Non. Par ailleurs, ce sont souvent les mêmes qui refusent la responsabilité quand ça merde par leur faute.

Admettons, t’es un sale mec méchant agrougrou. Tu vas obtenir ce que tu veux en manipulant. Tu vas pas coller des baffes à ton rencard le premier soir, non, il faut la ferrer, la capturer et la maintenir sous ta domination. Les femmes aiment pas forcément les méchants, c’est juste que les méchants font plus d’efforts de manipulation et qu’on se fait avoir. Le mec qui a failli me tuer à mains nues plusieurs fois était un total nice guy les premiers temps. Mais une fois ferrée, j’étais foutue. Je me suis pas dit « tiens, un mec beau et violent, j’y vais », non.

Ceux qui pleurent qu’ils sont blessés par une remarque sur l’utilisation du bac à légumes ne sont PAS séduisants, non.

Mais pas parce qu’ils sont faibles ou fragiles, non.

🤷‍♀️ Parce qu’on a juste pas envie d’être leur maman !!!

On fait comment, nous, quand on a un problème, hein ?

Sans commentaire.

 

L’amitié entre femmes

Et par extension, entre personnes faisant partie d’une minorité, est assez différente de l’ambiance vestiaires après un match. En général.

J’ai toujours trouvé mes amitiés féminines plus passionnelles et intéressantes. L’enjeu sexuel est dégagé, les limites sont mieux comprises. Et lorsqu’il y a un enjeu sexuel, on est pas vraiment à la chasse. J’ai mis du temps à entretenir mes relations avec d’autres personnes en minorité, j’aurais préféré savoir avant que les meufs c’est trop cool au lieu de m’emmerder en étant la seule femme à des soirées ineptes.

🥦 Mes amies savent à peu près tout de moi. Si l’une d’entre nous a un problème, on se concerte pour l’aider. Si je me sens subitement très très mal et que je suis seule à la maison, je sais qu’une pote se proposera de passer me voir ou tiendra la hotline de la déréalisation le temps qu’il le faudra. Mes potes me sauvent la vie, parfois, lorsque je suis en crise. Je leur parle, sans trop de crainte, je sais que je peux demander de l’aide, que je peux flooder comme une chacalette-emo-girl-de-15-ans. Je sais que je peux parler de tout, aussi. Je sais que si je dépasse une limite, on me le dira ou fera comprendre, pour me permettre de rectifier le tir.

L’entraide telle que celle-ci, je ne la retrouve pas chez mes amis hommes cis. Ils sont largués très vite, pas habitués à devoir secourir quelqu’une, n’ont pas les mots ni les réactions, et c’est normal car ils n’ont aucune connaissance de ce genre de choses.

🍺 Il y a un moment, genre loin, j’avais un pote alcoolique. Loin de l’aider à se sevrer, les potes faisaient tout pour le maintenir dans la picole. Ce pote m’en a parlé, de manière un peu honteuse, alors j’ai tenté d’apporter mon soutien discret. En vain. Pas boire, c’est pas drôle.

Un jour, ce type s’est blessé très sérieusement en faisant le con. J’étais dans un état plus que second, j’ai dégrisé direct pendant que les deux autres restaient bouche bée. Je l’ai collé sous la douche, j’ai nettoyé, désinfecté, pansementé. Les deux n’avaient pas bougé. « J’aime pas le sang ». Ouais moi non plus j’aime pas le sang et encore moins les plaies ouvertes (registre de la phobie chez moi, mais en situation d’urgence y’a pu de phobie), mais j’ai géré le pote. Les deux sont donc…partis en boîte en me laissant veiller sur leur pote. Le programme n’était pas d’aller en boîte, on devait rester chiller. Mais ils sont partis, et j’ai géré mon blessé toute seule toute la nuit. Il avait énormément bu, je l’ai mis en PLS près de moi et je l’ai surveillé toute la nuit.

Paye tes potes, hein ?

« Heureusement que t’étais là » ah bah oui hein. Tu te serais étouffé dans ta gerbe et tu te serais vidé de ton sang. Il ne m’a jamais remerciée. Personne ne m’a remerciée, d’ailleurs, parce que c’est mon rôle genré de femme qui soigne. Dont acte.

En miroir féministe, j’ai les réseaux qui se tissent autour des amies dont le mec est violent. Quand une amie veut s’échapper, on est là. Indéfectiblement, même si elle retourne avec le même connard 100 fois, on est là parce qu’on sait ce que c’est que l’emprise. L’entraide entre les daronne est fabuleuse, le soutien entre personnes dominées si fort que j’en ai des frissons là précisément maintenant.

Les femmes complotent

Les mecs pensent à tort qu’on lutte contre un ennemi commun : l’Homme.

Alors que non. On cherche à SURVIVRE aux hommes.

La vaste majorité de l’entraide féministe que je peux voir, c’est du reality check : est-ce que c’est moi ou ce type est un connard ? Comment l’éduquer ?
L’homme n’est pas l’ennemi, de base. Ce sont les connarditudes régulières qui nous rendent méfiantes. Quand tu te fais avoir, tu as tendance à ne plus vouloir te faire avoir. Les red flags et les conseils d’ami-es sont précieux à avoir. C’est ce savoir-là qui les menace. Si on commence à savoir comment ils nous mentent, c’est la fin des haricots. Les sorcières fomentent entre elles et c’est obligatoirement contre les hommes car, honnêtement, dans la vie d’une femme, il faut forcément un homme. Chaque pot son couvercle.

Je n’ai jamais vu de post visant à détruire un mec, et même les pires enfoirés que je peux percevoir sont décrit plutôt gentiment (on trouve des excuses, on euphémise la violence ou on la nie).

Ce n’est pas vrai de l’autre côté de la barrière. On va s’épargner des citations de commentaires misogynes, d’invitation au suicide et autres menaces de mort, je pense que tu vois bien ce dont je veux parler.

Je n’ai jamais retrouvé un tel niveau de violence chez les femmes hétérosexuelles lorsqu’elles parlent des hommes. Au pire, une vanne sur des sécateurs, et encore, bof. Le top violence c’est « ils sont pénibles » et des memes misandres. Pas d’expédition punitive ou de plan maudit pour les ruiner. Et surtout, pas de message contenant des photos d’organes génitaux non sollicitées. Mais comme la violence est centrale dans leurs relations à eux, ils imaginent qu’on tient le même type de propos haineux à leur sujet, alors que non. On sait ce que c’est, que la violence, et même envers un mec qu’on déteste, on ne le souhaite à personne.

Alors ok, j’ai pas fait l’ensemble du tour des internettes, m’enfin c’est quand même chelou que je ne tombe que sur des propos contrevenant à n’importe quelle charte provenant de mecs cis. Il y a les séparatistes, les TERF, on va dire que c’est presque nos incels à nous…mais là encore, la violence est totalement disproportionnée.

Comme si on présentait une menace pour eux. Et c’est pas faux vu qu’on veut abolir leurs privilèges. Merde, tout s’explique…

😱 Mais je m’égare totalement, dis-moi.

Des amitiés féminines dangereuses

Mes amitiés féminines sont beaucoup plus riches, en terme de panel d’émotions, de liens, d’amour. Je suis bien contente de ne plus être la seule nana de la bande. Il existe cette connivence, ce savoir commun indicible qui rassemble autour d’une ou plusieurs oppressions. Tout comme je suis toujours adorable avec les gens du téléphone parce que j’ai été à leur place avant : je ne veux pas être la reloue qui fait perdre du temps, je veux être aidante au possible et leur faciliter la tâche. Je sais ce que ça fait que de se faire agresser verbalement, je ne veux pas reproduire ça.

On est un peu sur le même mode : on SAIT. Il n’y a même pas besoin de confirmation, on SAIT. Chacune des femmes que j’ai connues et que je connais a été victime d’agression, au moins une fois. Chacune connaît les difficultés au travail, les difficultés avec l’autre parent, avec les enfants, puis la vie qui nous claque le beignet trop souvent.

C’est sans doute un peu ça que jalousent secrètement les hommes. Notre connivence a pour but de nous préserver d’eux, leur connivence a pour but de nous chasser, dans tous les sens du terme.

Nous ne les voyons pas comme ils nous voient.

Les hommes aiment-ils un peu les femmes ? Difficile à dire tant les exemples soutenant la thèse inverse sont nombreux.

Fuir le domicile pour aller boire des coups avec ses potes est le meilleur exemple. A quel moment tu as envie de voir ta femme, en fait ? Tu veux manger, mais tu ne veux pas la personne qui te fait à manger près de toi. Pour « être tranquille ». Tranquille de quoi ? De ton épouse qui te dit qu’il faut cesser de fuir tes problèmes ? Ce qui est chiant, c’est qu’une fois mariée, et encore plus avec des enfants, une épouse devient encombrante. Elle a fait le job, maintenant elle doit se faire discrète pour que tu aies l’impression que tout se fait par magie dans la maison. Et, finalement, la relation s’appauvrit avec le temps. On n’échange plus, on mène des vies séparées, on finit par se fuir pour ne pas aborder toute la merde planquée sous le tapis.

L’épouse est l’Ennemie. La mégère. Celle qui gueule tout le temps que tu fais rien de bien.

Panneau à l’entrée d’un bar
Se cacher de sa femme
Tarifs
1$ « Nope, il n’est pas là »
2$ « Vous venez de le rater »
3$ « Il a pris une seule boisson et est parti »
4$ « Je ne l’ai pas vu de toute la journée »
5$ « Je n’ai jamais entendu parler de lui »
(Merci de prévenir le barman avant l’arrivée)

Ce genre de blague si drôle est à mon sens un indicateur que ta femme est ton ennemie, si tu doit t’en cacher. Ce genre de blague si drôle montre également le niveau de connivence masculine.

« Et dites donc mademoiselle vous êtes charmante, si votre ramage et votre plumage sont d’accord on va chez moi ?
– Non.
– ESPECE DE SALOPE SALE PUTE MAL BAISÉE T’ES MOCHE T’EST TELLEMENT LAIDE QU’IL FAUDRAIT UN SAC EN PAPIER POUR TE BAISER !!! »

🐧 Ce que veulent les hommes 🐧

Sean, 39 ans Je suis un père célibataire de 3 enfants et un autre est en route. Ils sont mon univers. Si tu n’as pas ce qu’il faut pour m’aider à élever mes enfants, alors pousse-toi et laisse une vraie femme se présenter. Tu dois avoir ton propre véhicule, de préférence un minivan. Tu dois savoir cuisiner, nettoyer et être soumise. Pas plus grande que 1m65. Mince. Tu dois avoir ton propre moyen de subsistance et pas d’enfant à toi.

Tu vois, la contradiction ? La bascule ?

Tu ne dois surtout pas sortir de ton rôle utilitaire. D’ailleurs, les mecs qui sont amis avec leurs femmes sont mal vus, comme s’ils avaient un motif plus important que leur propre bien-être en tête. Ils vont appeler ça « faire le canard ». Un homme, un vrai, n’est pas ami avec la personne qu’il a épousée.

Un homme peut admirer, révérer, protéger, aimer un autre homme (mais platoniquement, ou alors faut faire valider ton hétérosexualité par des inconnus sur internet), il peut décider de prendre un autre homme sous son aile, lui faire des cadeaux, l’emmener en week-end (en tout bien tout honneur, pour aller voir un match ou un concert ou un truc de mecs), ils peuvent faire du sport ensemble, picoler ensemble et même bosser ensemble sans que jamais la présence de l’autre ne soit un fardeau.

Ce que veulent les hommes : d’autres hommes.

D’autres hommes dans l’espace public, au travail, au bistrot. Et les femmes bien cachées dans leurs cuisines avec les mouflets.

Et ça en dit long sur la considération qu’ils ont de nous. Utilitaire, tout aussi indispensable qu’un minivan, et surtout « pas comme nous ». Alors ils nous réservent la version frelatée de l’amour passionnel où la violence remplace progressivement la passion. Fuir sa femme pour aller boire des coups, c’est violent symboliquement, oui.

Nous, on est là pour agrémenter la vie de l’Homme de mille petites facilités : repas, chemises propres et repassées, rappel de l’agenda, prise de rdv chez le médecin, déclaration d’impôts, listes de courses, scolarité des enfants. Et ce, le plus discrètement possible, en respectant ses règles à lui. Si il te dit « ne grossis pas » tu ne manges plus. Si il te dit « Ce week-end je suis pas là » tu fermes ta gueule.

Il n’y a aucun amour, ici. Pas plus que dans la description Tinder de Sean, 39 ans. Sean ne cherche pas l’amour, il cherche une femme de ménage avec bénéfices.

Sean réserve le meilleur de lui-même à ses potes et j’ai tellement envie de faire une mauvaise vanne sur la validation de l’hétérosexualité par les pairs que je vais m’arrêter là 😁

 

Partie 4 : Parler de l’intimité, un problème viril

Récapitulons pour cette dernière partie :

Le désir homosocial est l’attirance « non sexuelle » pour les membres d’un même genre. On remarque que les hommes (cis) se favorisent entre eux au niveau professionnel, aiment passer du temps ensemble, s’admirent, s’émulent, se respectent, bref, on est dans une sorte de désir amoureux qui ne dit pas son nom. Les femmes, considérées comme des ennemies ou des proies, font l’objet de beaucoup moins de considération : on le voit avec les doubles standards en terme d’attentes (comportement servile, soumis) et de comportement en relation (zéro respect sauf gros gros coup de bol). Les femmes ne doivent idéalement pas être visibles en dehors du foyer. Sinon y’a un homme des cavernes qui vient l’enlever en lui tapant dessus avec son gourdin avant de la traîner par les cheveux jusqu’à sa granitière (sa garçonnière en granit).

Avant toute chose, une vidéo (en anglais, sous-titres FR dispo) que mon cher et tendre m’a envoyée, qui parle d’hommes et d’intimité. Mon épousé est vraiment un gros wokiste, je veux pas dire mais mince, je pense le dénoncer.

Entre mecs, on ne s’envoie pas de fleurs

Ce discours m’a pas mal touchée car ça rejoint quelque chose que j’avais constaté sans réellement savoir le situer : entre mecs, on s’envoie pas des fleurs. En général, on ne parle pas aux copains de ses problèmes sexuels ou de ses difficultés relationnelles. Le seul espace de réelle intimité tient dans l’acte sexuel en lui-même.

Il évoque aussi les expériences de TDS qui racontent leurs clients qui les payent juste pour parler, pour échanger, pour passer un moment en bonne compagnie sans que le sexe soit un passage obligé. Des ami-es TDS m’ont déjà livré de tels récits et c’est parfaitement cohérent avec cette immense solitude que je perçois chez les hommes.

A qui tu racontes ta vie ? Tes problèmes ?

Je connais par exemple les situations amoureuses de mes copaines, avec plus ou moins de détails. Je sais qu’unetelle a des difficultés de tel ordre, je sais qu’une autre angoisse pour tel motif. On échange, on se parle, on se soutient et on s’envoie des fleurs. On sait aussi se serrer dans nos bras. Même si j’aime pas bien ça, il paraît que ça fait du bien.

C’est super triste 😭

Une hétérocisnormativité pregnante

Un truc qui m’a pas mal interpellée, c’est cette nécessité de préciser « on est pas gays » (même si on couche ensemble, c’est internet qui le dit).Les amitiés viriles ne sont jamaiiiiiiiiis accompagnée de relations intimes. Never EVER EVER. Et quand on le fait, on reste hétéro par la magie du déni. On va pas forcément refaire le match de l’hétérocisnormativité (ok, si) mais c’est intimement lié. Le système a besoin de progéniture. De beaucoup de progéniture. Le fait de criminaliser l’homosexualité permet de faire vivre cette hégémonie hétérosexuelle. On oblige donc des personnes à sortir de l’homosexualité, par la prière, par les camps de conversion (faudra en parler, tiens), par la violence ou la contrainte. On marie de force pour être à peu près sûrs qu’il y aura des bébés.

C’est un peu comme la reproduction des animaux de race, oui. On ne les laisse pas choisir leur partenaire, on les oblige à copuler, on vole leurs bébés car c’est bien là tout le but de la manœuvre : un chien adulte coûtera moins cher à adopter qu’un chien tout neuf qui n’a jamais servi. Peu de personnes adoptent des animaux adultes par peur qu’ils soient « mal dressés » ou « trop caractériels ». On adopte un animal jeune en espérant pouvoir l’éduquer à sa manière, les individus adultes sont déjà éduqués, c’est moins marrant.

Dresser les enfants

Ben les enfants c’est un peu pareil : on veut croire que ce petit gigot fera tout ce qu’on lui demande de faire, en se fourrant le doigt dans l’œil jusqu’au coude. Mais on a cet espoir, c’est un immense sujet d’intérêt pour la Science. Il y a eu pas mal d’expérimentations sur les enfants et les bébés.

On a par exemple l’histoire behaviouriste (dressage comportemental/Pavlov) du Petit Albert (pas le grimoire, l’enfant), 9 mois, à qui on a voulu inculquer la phobie des animaux pour étudier les phobies, ou celle du bébé élevé avec un singe « juste pour voir ». Mais ça fera peut-être l’objet d’un autre billet. Ce que je veux dire, c’est qu’on est convaincu-es de pouvoir modeler les enfants comme on le souhaite, c’est un désir surtout masculin, preuve en sont tous ces pères violents gardant la main sur leurs enfants en garde alternée après la séparation, et qui prend un malin plaisir à démonter tout ce que maman dit. L’instrumentalisation des enfants est une technique brutale mais très utilisée par beaucoup de parents (hommes ou femmes). Je garde quand même mes histoires d’ado qui se retrouvent à traiter leur mère de « sale pute » du jour au lendemain. Alors que les putes sont pas sales, déjà, et ensuite, c’est un métier tout à fait honorable, cette expression n’a aucun sens.

Ok, les bébés labrador, j’avoue, c’est horriblement mignon…

Des femmes indésirables mais indispensables

👉 On a donc besoin de main d’œuvre, donc on fait faire des bébés. Plein.

Et pour ça, ben faut que les organes génitaux des personnes soient dans le bon sens. L’homosexualité ne produisant à priori pas d’enfant « naturellement » (La limite est l’homme enceint et mate moi ces grosses réactions de merde), elle n’est pas productive dans le domaine. Ni productive, ni même souhaitable, preuve en est la merde avec la PMA, parce que ces gens doivent se dire qu’un enfant-à-modeler élevé par des parents non hétéro deviendra non-hétéro. C’est complètement con, on est d’accord.

Sortir de l’hétéronormativité produirait plein de choses, mais surtout, cela décentraliserait le regard sur la reproduction de la main d’œuvre du capitalisme et appuierait là où ça fait mal : le sexe n’est pas que reproductif. Et delà…si le sexe n’est pas que reproductif, les implications sont énormes.

Le patriarcat a donc tout à gagner en renforçant la cishétéronormativité : les gens sont dans les clous, les gens produisent et se reproduisent. Tout ce qui sort de ce modèle est une menace pour la stabilité du Monde Libre qui est effectivement à l’heure actuelle on ne peut plus stable.

Une homophobie homophile

Ça explique donc la nécessité de validation de ses relations homosexuelles comme étant « juste du sexe, rien à voir avec l’homosexualité ». Je place ça ici : les relations entre hommes dans la Grèce Antique.

J’ai déjà entendu des mecs énoncer fermement des trucs complètement cons, mais là, j’avoue, je suis un peu perplexe. Cela situe le niveau d’homophobie, surtout, et d’homophobie intériorisée.

Cette connivence entre hommes est toujours « en tout bien tout honneur ». Les comportements sont de l’ordre de la drague, du flirt, de la relation sentimentale, mais c’est entre mecs, donc absolument désexualisé, bien sûr. Ils s’aiment entre eux mais « pas comme ça ».

Par contre, un homme-couvercle qui se respecte doit trouver son pot et fonder une famille. Cherche pas, c’est la loi. Un homme célibataire endurci sans aucune relation avec des femmes est soupçonné d’être gay. Il l’est peut-être, qu’est-ce qu’on s’en fout. Mais là, il sort du cadre et il sait que s’il sort du cadre de l’hétérosexualité, il sera déclassé par ses pairs, et ça, c’est gravissime.

Cela explique un peu l’image de la lesbienne-danger, une femme insensible au charme masculin (j’ai ri en écrivant ces mots, pardon) et plus copine avec d’autres femmes sera une lesbienne. Y’a pas d’entre deux : soit tu acceptes les règles du jeu en te laissant enfermer dans une vie de famille, soit tu es une lesbienne, car rien ne peut expliquer qu’on n’aime pas les hommes. Rien. Absolument rien. Ils sont parfaits et agissent raisonnablement en toutes circonstances. Parfois, les lesbiennes présentent un challenge pour ceux qui vont s’aventurer à dire que c’est parce qu’elles n’ont jamais connu de VRAI homme. On peut pas juste aimer les femmes, non. Impossible.

Délabrement émotionnel et danger pour le monde

Bah je trouve ça triste. Sincèrement. La masculinité idéalisée endommage tout le monde. Elle sera profitable à certains hommes avec des fantasmes de domination et les moyens qui vont avec (méritocratie ftw), vu qu’on vend ce modèle de masculinité en bundle avec Ma Première Barbie et qu’on dresse les femmes à ignorer les red flags. Mais elle se fera au détriment des autres, qui restent tout de même persuadés qu’il faut rester dans la course et qui réprimeront donc toute manifestation non virile (pleurs, couinements de joie, sautillements, câlins, vernis à ongles) en eux. Alors que le vernir à ongles c’est quand même super cool.

Il y a une coupure de l’affect chez beaucoup. Ils disent plus facilement pouvoir dissocier le sexe de l’amour que les femmes (alors qu’ils n’en savent rien) justement car l’amour, c’est compliqué. Un mec qui a des manifestations d’affection envers sa compagne sera bizarre. Sans doute un canard.

Je dis ça car je suis dans une relation hétéro-mono plutôt heureuse, qu’on se sourit, qu’on se parle, qu’on a des gestes affectueux l’un envers l’autre. Et on nous le fait remarquer, surtout à moi. J’ai de la chance, dit-on, d’avoir un partenaire attentionné qui sait montrer ses émotions. J’estime avoir de la chance, oui, mais ça n’a pas grand chose à voir avec la relation que nous avons, ce sont les projections que l’on en fait qui m’interrogent. « Vous êtes mignons c’est insoutenable ». En réalité, ce qu’on nous dit, c’est que mon mari se comporte différemment de ce qui est attendu de lui. Je te le dis tout de suite, si tu attends qu’il gueule et que je retourne passer la serpillère, c’est mort. Si tu attends qu’il soit indifférent et non aidant, c’est mort. C’est ça, la projection : l’anormalité de notre couple plutôt sain. On est ensemble depuis 15 ans, je n’ai aucune intention de me barrer, surtout s’il continue à m’envoyer des vidéos wokistes comme ça. Mais ça semble anormal à beaucoup, pas forcément dans un sens négatif, mais dans un sens surprenant.

Barry Farley Visual Arts
DEEP SPACE ANOMALY (2020)

 

On doit pas être pote avec sa femme, tu vois ?

Parce qu’après, c’est le début des emmerdes. Être pote avec ta femme, c’est pactiser avec l’ennemie et trop te livrer pour qu’elle l’utilise ensuite contre toi. Hier, on a pu voir que les femmes étaient leurs ennemies, notamment avec les stratégies de fuite du domicile conjugal. Être ami avec sa femme est totalement anormal. On est une famille, une équipe, on est pas potes. C’est également valable pour l’amitié avec une femme qu’on a pas couché avec. Incompréhensible pour beaucoup. L’amitié homme-femme est soit disant impossible parce que le cul. La vache, si c’était vrai, on en aurait plein, des bébés, non ? Tu ne crois pas ?

Tu as une femme, tu l’as gagnée au tir à la carabine à la foire, tu la gardes, peu importe ce qu’il arrive. Tu la gardes mais tu ne lui parles pas, ou alors bourré. On garde tout dedans. Les problèmes, les questions existentielles, les angoisses, on garde tout dedans. Puis ça explose, elle comprend rien (forcément) et tu te sens incompris et peu soutenu. Serait-ce en rapport avec ce refus d’intimité (pas au sens sexuel) ? Est-ce parce qu’elle est sensée pouvoir lire dans tes pensées ? Voilà. Et c’est donc de sa faute. Elle arrive à entretenir tes gosses, ta maison, mais elle est même pas foutue de faire le SAV affectif d’elle-même si on ne lui parle pas. Très très moyen, pour des sorcières qui lisent dans les pensées, un peu la honte quoi.

Et, en effet, on doit souvent deviner. Je connais mon modèle, je sais que quand il a un certain regard, une certaine posture, c’est qu’un truc ne va pas. Je lui demande, alors. Il rechigne encore à me parler de ses difficultés mais c’est de moins en moins compliqué, je trouve.

Mais au moins, il dit pas « si, si, tout va bien » alors qu’un de ses datacenter prend feu en Bulgarie (connaissant mes capacités de jinx j’ai cité un pays où normalement il n’en a pas).

Se rassurer par l’aveuglement

Alors, le Boy’s Club. Pour ne pas échanger de vraie intimité et de vraie affection avec ses potes tout en surjouant la masculinité toxique. Pour conjurer toutes ces merdes sentimentales et autres amours compliquées. On se rassure en se tapant dans le dos, en pensant renforcer notre puissance virile entre mecs. Pas besoin de sentiments, dans cet univers. Juste des potes, de la déconne et des moyens détournés pour se sentir moins seuls et oublier.

« La la la je n’entends rien la la la tout va bien je bois des bières avec les copains »

Sortis du tunnel professionnel, il faut retourner dans une zone où les problèmes non gérés n’ont pas leur place. Parce que, concrètement, que ton couple aille bien, ça ne les arrange pas, tes potes. Si ton couple va bien, alors ça veut dire que tu es ami avec ta femme. Si la tendance persiste, tu es toi aussi déclassé : bienvenue chez les canards. On va te dire que ta meuf te traîne par le bout du nez, qu’elle « porte la culotte » et autres conneries abyssales (ou alors je suis la seule personne au monde à avoir plusieurs culottes ?). Faut te réaffirmer, mec, prendre le dessus, lui montrer qui est le patron ! Pour quoi faire ? Mystère.

Je retourne chez Jean Claude Romand, qui a assassiné ses parents, sa femme et ses enfants et le chien avant de faire comme 99% des presonnes qui commettent des familicides : rater sa propre mort, oh, pas de bol. Oui, il y a également des femmes qui font la même chose et qui se ratent (Geneviève Lhermitte), les motifs sont très différents.

OMFG ils avaient un labrador !

Jean-Claude Romand : family anihilator

Chez Jean-Claude Romand, tout est parti d’un mensonge : il a raté sa deuxième année de médecine. Au lieu d’avouer la défaite, il va faire croire à tout son entourage qu’il est passé en troisième année, en suivant les cours mais en restant, chaque année, inscrit en deuxième année. De mémoire, il avait déjà rencontré sa femme Florence qui suivait des cours dans la même faculté, en pharmacologie. Au lieu de dire « je me suis raté, je ne me suis pas levé ce matin-là pour aller aux examens car je suis très déprimé en ce moment », il a bâti un empire de mensonges, jusqu’à faire croire en une embauche à l’OMS. En réalité, il détournait l’argent de ses proches pour faire vivre sa famille. Les proches en question ont commencé à vouloir récupérer leurs thunes, il s’est retrouvé acculé. Alors, au lieu de se mettre face à lui-même, il a poursuivi le mensonge et tué pour que ses plus proches ne soient pas des victimes collatérales de ce mensonge. Paye ta logique.

Le pire c’est que c’est loin d’être un cas unique. Il existe plusieurs affaires (dont la célébrissime affaire Chris Watts) où, lorsque la façade se fissure, la mort semble la meilleure option. Tu imagines, quand même, en arriver à cette conclusion ? Ils tuent au lieu de perdre la face ou de divorcer. Sauf que heu ils vont en taule quoi, c’est moins rentable qu’un divorce.

Ici, femme et enfants sont des objets, iels sont la propriété de l’homme, qui peut donc décider de leur vie ou de leur mort. On a une surpuissance fantasmée conjuguée à un refus de voir la réalité en face qui donne, parfois, des actes de violence inimaginables. Nous, femmes, n’avons qu’un rôle utilitaire. On peut donc nous mettre au rebut quand nous devenons vieilles ou trop affirmées. Notre avis n’est ni souhaité, ni souhaitable.

Je reste persuadée, et cette idée est vraiment vrillée en moi, que si ces mecs étaient amis avec leurs épouses, s’ils avaient su partager leurs difficultés, leurs doutes, leurs questionnements, ça ne serait pas arrivé. Si Jean Claude Romand avait avoué que oui, il avait déçu ses parents, il ne serait pas parti dans cette succession d’escroqueries funestes. Il a menti de peur de décevoir, il a joué le jeu de la réussite par conformisme social, pour finir par tuer ceuxlles qu’il aimait.

Fuir, fuir, fuir

On est dans les extrêmes, oui. Sauf que ces extrêmes là, ils se produisent, et plus souvent que ce que tu ne le penses.

J’ai pas envie de plaindre les mecs, vraiment pas. Ce sont eux qui me rendent la vie si difficile. J’aimerais juste dire ça : si tu as un problème grave, parles-en. La fuite en avant, ça ne mène que dans le mur, c’est vraiment pas ça qui va te sauver. Échouer n’est pas grave, sauf si tu es spéléologue sous marin, chirurgien ou contrôleur aérien. Tu as le droit d’être fragile, d’avoir besoin d’amour, de reconnaissance, de réconfort, de sécurité. Ce n’est ni grave ni signe d' »homosexualité » de ta part (les mecs qui se vannent entre eux en disant « gayyyy » sont des parasites). C’est signe que tu es humain. En tant qu’humain, tu disposes d’un truc formidable qu’on appelle la vie en communauté, la société, et qui te permet de disposer d’oreilles attentives au besoin.

Et on en est là.

Des hommes muselés qui déchargent leur frustration auprès de leurs « bros » sans jamais dire le fond du problème. Les « bros » s’en foutent, d’ailleurs, de tes problèmes.

Mais ils t’apportent un sentiment d’appartenance ainsi que la masse de privilèges qui va avec l’existence des boy’s clubs. Ces privilèges là sont important, c’est les réseaux professionnels ou d’influence. Tu as accès à un endroit où les choses se décident sans les femmes, tu as la sensation d’être unique et puissant. Le bénéfice est perçu comme supérieur au risque.

Le choix des hommes

Il y a un choix qui est fait, oui, lorsqu’on se prête au jeu du désir homosocial : par ce choix, on décide d’exclure les femmes non utilisables de certains espaces. On choisit de camoufler ses problèmes et de faire croire qu’on est un mec puissant à qui rien ne résiste. C’est très gratifiant dans l’immédiat, je n’ai aucun doute là dessus. Mais ça entraîne aussi une baisse drastique de l’affectivité en général. On se retrouve à être plus sympa avec les hommes qu’avec ces succubes venues de l’enfer. On se retrouve à ne plus pouvoir ni devoir parler de ses problèmes existentiels. On peut jouer à celui qui va super bien et tout le monde fait semblant d’y croire.

Mais on y gagne quoi, au fond ? Des récompenses matérielles ou symboliques du capitalisme. Whaou t’es directeur. Much success. Much power 🙄

Et si tu ne joues pas le jeu, tu es un canard, ou un incel, ou un pauvre mec. Si tu affirmes ta sensibilité, que tu en parles, tu es « gay ». Je ne suis vraiment pas sûre du tout que le bénéfice soit supérieur au risque, en fait, si on replace ce mécanisme dans le système.

En gros, tu te fais manipuler par le capitalisme pour produire et consommer toujours plus : plus de boulot, plus d’enfants, plus d’argent. Après, je dis pas, c’est peut-être ton but dans la vie, auquel cas je pense que tu t’es planté de page. Mais est-ce vraiment ça, le bonheur, l’amour, la sérénité ? Est-ce si confortable que ça que de refuser d’aborder tes problèmes parce que t’es un bonhomme, toi ?

Je suis contente d’avoir fait cette série de billets qu’on va arrêter là pour le moment. J’ai appris énormément de choses sur les relations entre les hommes, le boy’s club et tout et tout, c’était vraiment cool d’y réfléchir et de découvrir des ressources, ça m’a ouvert plein d’autres pistes de réflexion.

Juste…je suis triste. Sincèrement triste. Les rapports masculins sont construits sur des valeurs toxiques qui leur font du mal. Je sais que si certains s’y sentent à l’aise, c’est une contrainte pour beaucoup. Coller aux codes de la virilité, encourager la violence et tout le merdier, c’est pas vraiment sain.

Alors, je ne vous aiderai pas, parce que ce n’est pas mon combat. Mais je vous écouterai si vous avez besoin d’en parler. Le reste, c’est à vous de le démonter, brique par brique, en commençant par au moins respecter les autres pour, allez, peut-être même les aimer et leur faire confiance.

Deviens ami avec ta partenaire de vie, tu verras, y’a plein de trucs cools à découvrir !