Un petit billet de milieu de journée, il me faudrait une intro. On va dire que ce paragraphe est une intro ? On va parler de Gabriel Attal qui souhaite renforcer l’autoritarisme scolaire (après le “réarmement démographique”, les uniformes, le SNU, je veux pas faire l’oiseau de mauvais augure, mais ça pue, va falloir l’admettre). On est sur des sanctions à l’encontre des parents “démissionnaires” et des réponses pénales plus fréquentes et sévères.

J’ai vaguement vu Gabriel Attal (né en 1989, premier ministre) causer éducation hier, et j’avoue qu’après la couche classique de rire sarcastique, l’agacement est arrivé assez vite. Son visage, comme celui de Darmanin, a un effet assez rapide sur moi. Et je suis plus vieille que ce type. Non seulement je suis plus vieille, mais je suis à mon avis une humaine plutôt décente, niveau sororité, tout ça… Je ne suis pas jalouse, je détesterais faire son taff et je pense que je détesterais être n’importe lequel de ces petits costards. J’en viens, à voir leurs parcours, à me dire que franchement, ma vie a été plutôt cool et constructive.

Dans tous les cas, j’ai vu du pays, j’ai rencontré plein de gens, j’ai vécu à l’arrache, j’ai rigolé assez souvent et j’ai des souvenirs absolument épiques. En plus, je préfère mon cercle amical, merci.

Gabriel, déjà, bonhomme, t’as pas d’enfant, et ton éducation s’est déroulée dans des lieux où ta classe sociale se reproduit. Ta vision du monde est limitée, beaucoup plus que ce que tu ne le crois.

Mate sa bio Wikipédia

🐦”Gabriel Nissim Attal naît le 16 mars 1989 à Clamart et grandit dans les 13e et 14e arrondissement de Paris, dans une famille aisée. Baptisé en la cathédrale Saint-Alexandre-Nevsky et élevé par sa mère dans la foi chrétienne orthodoxe, il se considère comme non-croyant.

Son père, Yves Attal (1948-2015), avocat et producteur de cinéma, descend par son père Claude Attal (1916-1978, né à Tunis, naturalisé français en janvier 19379 et devenu chef de service en pédiatrie à Paris) d’une famille juive tunisienne et par sa mère Jeanine Weil (1920-2011) d’Ashkénazes parisiens d’origine alsacienne (un de ses cousins éloignés est Théophile Bader, cofondateur des Galeries Lafayette). De par son nom de famille, son père, non-pratiquant, lui avait dit : « Tu te sentiras toute ta vie solidaire des Juifs car tu subiras comme eux l’antisémitisme ». Il meurt d’un cancer foudroyant le 12 novembre 2015 à Paris, à l’âge de 66 ans.

Sa mère, Marie de Couriss (née en 1964), salariée d’une société de production, descend par son père Alexandre “Sandrik” de Couriss (1925-2006), porte-parole français de l’avionneur Boeing, d’une famille de Russes blancs d’Odessa d’origine grecque, liée aux familles Meyendorff, Dolgorouki, Galitzine et Orlov, et par sa mère Anne-Marie de La Forest Divonne (1927-2005), des pairs de France Louis de La Forest Divonne (1765-1838), Guillaume Pavée de Vendeuvre (1779-1870) et Philippe Panon Desbassayns (1774-1840), tous trois hommes politiques sous la Restauration.

Gabriel Attal a deux sœurs cadettes, et une demi-sœur aînée issue du précédent mariage de son père Yves Attal. Il a aussi un frère adoptif, fils d’une cousine décédée dans un accident de voiture en 2016. Après le divorce de ses parents en 2000, il ajoute le nom de sa mère à son patronyme et se fait appeler « Gabriel Attal de Couriss ».

Non, après, je dis pas, y’en a des bien, pourquoi pas (je ne parle pas de religion), mais ce mec a 35 balais et a vu de la vie uniquement ce que son prisme bourgeois a bien voulu lui montrer. Il n’a absolument ZÉRO idée de ce que c’est que de vivre une adolescence normale.

Est-ce que, lui aussi, il s’est fait harceler ? Tabasser ? Je sais que les bizutages peuvent être durs, mais ça ne compte pas, vous signez pour ça en général. Un peu de souffrance, ça crée des liens utiles pour l’avenir. Oh, parfois, ça tue. Notamment un étudiant racisé en Belgique, Sanda Dia, tu te souviens ? A l’Université Catholique de Louvain ? 2018 ? 18 accusés pour sa mort, 18 reconnus coupables et attention, tu vas t’énerver, respire, des travaux d’intérêt généraux pour toute punition. Pas bien lourd, hein ? On en parle, de cette violence, ou pas ? Des pratiques de bizutage mais aussi les viols et le harcèlement sexuel dans les grandes écoles ?

La violence des riches ne mène pas, ou peu, à l’incarcération

…cette incarcération qu’ils chérissent tant pour tous les autres, ceux qui n’ont pas eu la chance de naître dans les quartiers huppés de Clamart. Toi, tu chipes une brioche à Monop, c’est fini. Eux, ils bousillent des entreprises entières, avec le sourire, provoquent des morts en pagaille et rha voilà, voilà, je suis tombée dans mes ruminations. Balkany est-il en prison actuellement ? Voilà.

Gaby, ton engeance ne connaît ni le besoin ni la prison, d’où tu nous parles, à nous, parents, de cette manière-là ? C’est franchement irrespectueux, déjà, tu sais pas à quel point c’est dur, et puis tu te permets des jugements de valeur aux gros relents racistes des “parents démissionnaires”, sérieusement, tu vas très vite te calmer et aller ranger ta chambre, Gabriel ! Qu’est-ce que c’est que ces manières ?

Allez, zou, laisse les adultes parler.

La violence scolaire existe. Je suis au courant. J’ai perdu une camarade de collège des mains d’une autre camarade en 1995, au sein de l’établissement. Cette conversation, on ne l’a pas d’hier. Ce n’est pas la seule, au fil des années il y a toujours plusieurs drames évitables de ce type.

Je n’ai pas vécu en cité, mais j’ai vécu des situations de violence au collège, puis au lycée. Mes parents ont aussi vécu des situations de harcèlement scolaire, et je te raconte pas l’école du temps de nos grands parents. L’école est un formidable outil mais aussi un lieu de broyage et de formatage. Et ça me fait chier, parce que j’ai des potes dans l’Éducation Nationale, je les vois galérer, je sais combien iels perçoivent comme “salaire”, c’est du foutage de gueule RO-YAL.

Je vais poser ça là maintenant : l’autoritarisme, ça ne fonctionne pas, ça n’a jamais fonctionné et ça ne fonctionnera jamais. Si ton objectif est de rendre ton gosse heureux, j’entends. Si tu veux le terroriser pour qu’il obéisse, c’est (malheureusement) toi qui vois.

C’est l’autoritarisme qui m’a rendue telle que je suis. Voilà. Je suis devenue une vieille anar. Not very effective.

 

1964

J’étais en 1964, ce matin, dans un livre collecté pour mes recherches sur l’histoire de l’éducation.

L’adolescent. Par D. Origlia et H. Ouillon. Mate cette photo de grande beauté :

En 1964, les temps changent. Les boomers sont ou deviendront adolescent-es. Et, déjà, on retrouve ce début de panique morale. Le rôle du père ! Le rôle du père a changé ! Les femmes travaillent ! Elles n’ont plus le temps d’élever leur progéniture ! Et, laissée à elle-même, cette progéniture devient déviante, par exemple en ayant des pulsions homosexuelles (mais “c’est une phase”, heureusement). A les lire, toutes les personnes adolescentes en 1964 ont mal fini et tout est foutu si on ne redresse pas la barre très rapidement.

Génération de déliquant-es !!!

Les femmes ne sont plus au foyer : perte de repère et de valeurs.
Les hommes perdent de leur autorité : tout va à vau l’eau.

En gros on est sur ce mode, c’est évidemment plus complexe que ça, mais ce sont les bases. Il faut rétablir le patriarcat (qui a momentanément disparu avant 1964, il semblerait, avant de revenir, on a loupé le coche) pour rétablir la DISCIPLINE et l’AUTORITÉ avec de gros yeux.

C’est, je pense, le but de toute panique morale : rétablir un ordre où rien ne peut dépasser. Restreindre, contraindre, arracher les mauvaises herbes, cramer le lierre au lance-flammes pour laisser les roses pousser. Si seulement on pouvait les détecter à la maternelle et les ficher, se lamentait déjà Sarkozy il y a mille ans…

1964 et on a pas bougé d’un pouce. La honte, un peu.

La violence existe

La violence scolaire est plus subtile que la violence domestique, et, je pense, plus ravageuse que beaucoup de violences en entreprise, attendu qu’on parle ici d’enfants.

La première forme de violence scolaire vient de l’école. Moi, c’est ça, qui me tue. L’école reproduit les inégalités. L’école broie des gamins. Parcoursup, nom de dieu !

Je ne sais pas si tout le monde a oublié par magie, comme pour les accouchements, mais l’école c’est ultra stressant en permanence. Les parents ont des attentes, les profs ont des attentes, le système a des attentes, et toi tu fermes juste bien ta gueule et tu bosses. La violence de l’école est insidieuse : des adultes te “recadrent”, se permettent de te dire des trucs qui leur vaudraient des procès si tu étais un-e employé-e, le système est injuste, punitif, ingrat. Pour autant, j’ai un immense, immense respect pour les personnes qui y travaillent et qui sont, en général, tout aussi victimes que leurs élèves. La pression mise sur les profs est inimaginable, je ferais un burn out au bout de 2 mois.

On veut rendre le système ENCORE PIRE ? Encore plus fliquant ? Encore plus répressif ? Augmenter les punitions (sauf pour les bizutages ou les agressions sexuelles), punir les enfants, encore et encore. Parce que gueuler, ça marche pas, mais ça donne l’impression d’être puissant-e.

 

Image par Gerd Altmann de Pixabay

Et punir les parents

En 1964, on se plaint que les femmes travaillent. En 2024, personne n’a vraiment le choix. Rester à la maison est un luxe. Donc tu as un, deux, ou plus d’enfants, et c’est toi qui seras punie. On ne punit pas les pères pour la violence de leurs enfants, non. Ce ne sont pas eux qui ont le jugement d’une “mauvaise éducation” ou d’un “laxisme”, on ne va pas se mentir. Un daron peut être là 1 jour sur 1000, il sera applaudi. Si le daron cogne pas, t’as du bol, alors te plains pas. Si le daron fait son boulot, c’est un héros. Même s’il ne vide jamais le lave-vaisselle et laisse traîner ses chaussettes 😡

Non, ce sont les mères qui vont, par exemple, perdre leurs allocations ou subir des sanctions, comme ça a déjà été proposé. Comme ça, t’as encore MOINS d’argent pour aider tes enfants. Ma-gni-fique. Sublime. Changez rien, c’est parfait. Une mère qui a du mal à suivre sera très très aidée par ces sanctions, j’imagine que cela ne pourra être que positif. L’insécurité financière est toujours source de relaxation et de bien-être, permettant d’aborder la parentalité de manière plus sereine et apaisée. Bien sûr.

Arrête de râler et propose des trucs, maintenant.

D’accord. Faisons ça.

Je propose qu’on rende tous les musées de France, publics et privés, gratuits pour les mineur-es. Médiathèques, ludothèques, transports, gratuit. La culture, c’est important et ça doit absolument être accessible à toustes.

Tu veux que ton gosse décroche de Tik Tok ? Et si son école avait assez d’argent pour lui permettre de faire plus de sorties ? Et s’il pouvait voyager sans que toute la coopérative scolaire ne tienne sur le dos des parents ? Et si on organisait du périscolaire de manière indépendante, entre parents ? Cela nous permettrait au moins de parler entre parents de temps en temps au lieu de nous juger alors qu’on attend la sortie du Précieux.

Et si on leur demandait quelles sont leurs passions ? Et si on leur demandait ce qui les anime, profondément, ce qui les fait vibrer, ce qui met des paillettes dans leurs yeux ? La musique, le dessin, le théâtre, ou juste jouer en ligne avec ses potes ? On s’en fout, que ta passion soit ton travail, que tu gagnes de l’argent avec ou pas. Une passion, un hobby, c’est un moment à toi, pour toi et pour les autres si tu en as envie. Non, tout le monde ne deviendra pas un Youtuber célèbre. Et alors ? Fais tes vidéos, crée ton contenu !

Et si on arrêtait de dévaloriser les filières techniques ? Si on se disait, merde, les plombier-es, c’est quand même des gens super compétent-es ? On a besoin d’infrastructures, on a besoin d’ouvrier-es, de personnes qui ont suivi ces filières-là. Le savoir n’est pas qu’académique. Moi, j’ai un savoir académique et je me fait martyriser par ma douche, en ce moment. Bah ça me fait une belle jambe d’avoir lu autant de bouquins quand l’eau devient froide.

Et si on considérait qu’internet est un lieu valable pour y passer son temps ? Qu’on pouvait y avoir des amitiés, des amours, une vie sociale riche et épanouissante, tout autant, sinon plus que dans les relations uniquement “dans la vraie vie” ? Je suis bien contente de trouver des personnes d’autres fuseaux horaires quand je ne sais pas dormir. Il y a toujours une lumière, et ça me rassure.

Et si on supprimait la publicité ?

Les smartphones sont coupables ? Tik Tok, Insta, usines à dépression ?

Et si on cessait d’être bombardé-es en permanence de publicité, souvent déguisée, d’images qui nous gueulent dessus à nous faire regretter la mort de la balise <*blink> ?

Mais…qui d’autre que les politiques et les publicitaires ont intérêt à conserver cette dépendance aux écrans ? La panique artificielle sur les canons de beauté surréalistes, ça envoie de la thune à l’industrie de la minceur et du cosmétique. Les instagrammeuses surréalistes entretiennent ça. Aucun intérêt à réguler ou proposer d’autres contenus. Les pseudo-coach profitent de la misère des autres pour vendre des cours vides de sens, tes anciennes copines de lycée se mettent à vendre des Tupperware, tout est business. Peut-on considérer ces litanies de success stories photoshoppées comme du contenu ? Je ne le pense pas. Mais tout est fait pour retenir notre attention. Pour nous faire consommer, oui. Les marques pâtiraient beaucoup d’une diminution du temps d’écran, en réalité. Ce n’est pas dans leur intérêt. Tu crois que Manu ne le sait pas, quand il fait la morale sur le temps d’écran et les troubles de l’attention ? Lui-même est vu sur Tik Tok et licencie ses ministres sur Twitter. Hypocrisie.

L’actualité anxiogène nous maintient également sous perfusion de bad trip. Chaque matin, j’ai envie de pleurer en lisant les news. Surtout quand j’observe le langage journalistique, le lent glissement à droite, l’orientation des lignes éditoriales et, oui, toute cette foutue propagande. Mais il faut que je continue, et me voilà happée à lire les commentaires sur France Info. Moins 12 points en santé mentale. Ça aussi, c’est du temps d’écran nocif. Mais on a tout intérêt à maintenir la peur pour faire valoir ce pseudo besoin de sévérité et de rigueur. Le spectre de la guerre nous rend conservateur-ices.

Anxiété

On est un pays totalement gaslighté. Du matin au soir. Chaque nouvelle offense gouvernementale doit être acceptée sans ciller. Eux ont le droit de conduire certain-es d’entre nous à la mort, mais toi, tu te tais et tu écoutes le monsieur.

Nous sommes anxieux-ses, hein ? Et nos enfants ? T’imagine, te projeter adulte en 2034 ? On leur laisse que dalle si ce n’est des micro-plastiques et de la dette. Comment tu veux avoir envie de jouer selon les règles, alors que l’état ne les suit pas lui-même et n’assure pas sa fonction de base pour juste générer du profit comme si la startup nation avait finalement été immatriculée au Tribunal du Commerce ?

C’est ptet ça qu’il faut leur rendre. L’espoir. Mais, pour le moment, l’espoir, j’en ai pas trop en stock. Mon seul espoir est qu’iels soient moins bêtes que nous.